Different but the same (+ Ellery Eskelin, Tony Marino, Jim Black)

David Liebman

par Damien Rupied le 18/09/2005

Note: 9.0    
Morceaux qui Tuent
Tie those laces
What is this thing


David Liebman et Ellery Eskelin sont tous les deux des saxophonistes un peu à part, en dehors des principaux courants qui animent le jazz d'aujourd'hui. Ni tout à fait free, ni dans le pur swing. Au delà du bop, explorateurs des zones frontières du jazz contemporain, leur différence est leur point commun. Leur rencontre n'en fait que plus sens.

Pour ce disque paru chez Hat Hut (trente ans de bons et loyaux services cette année pour le label suisse), les deux saxophonistes ténor sont tous les deux venus avec un fidèle : le contrebassiste Tony Marino pour Liebman et l'indispensable Jim Black, l'un des batteurs les plus inventifs de la dernière décénie, pour Eskelin. On a donc en quelques sortes un double plaisir à écouter ce disque : celui procuré par l'échange (plus que la confrontation) entre les deux ténors, mais aussi celui d'apprécier une fois de plus le drumming éclaté de Jim Black.
Rythmiquement, la musique oscille constamment entre swing entraînant et dérapages contrôlés qui lorgnent vers plus d'abstraction. De même, les lignes mélodiques viennent se briser pour mieux ressurgir un peu plus loin. On est vraiment constamment sur la crête entre post-bop et improvisation free. Le répertoire est à l'image des deux leaders : on y trouve, à côté des pièces signés par les deux saxophonistes, des morceaux de Tadd Dameron, Lee Konitz, Wayne Shorter ou encore le "What is this thing called love" de Cole Porter. De cette riche tradition, ils extraient de quoi dérouler leur son puissant et enlevé au sax, dans un élan fougueux parfaitement secondé par une paire rythmique qui s'est visiblement vite trouvée.
L'ensemble dégage une grande énergie, beaucoup de puissance, mais aussi de subtils déséquilibres qui font toute la richesse de cette musique. Ce qui s'appelle peut-être tout simplement de la beauté.