Push the triangle Cos la machina (Franck Vigroux, Stephane Payen, Michel Blanc)

Push the Triangle

par Sophie Chambon le 19/03/2005

Note: 8.0    

On avait repéré Franck Vigroux dès son premier album "Les treize cicatrices", on croyait le connaître, mais depuis 2002, le musicien n'a cessé d'évoluer, avec l'ambition affirmée de voyager entre projets, sons, univers.

Push the Triangle est le nom de son nouveau trio créé au printemps 2004 avec Stéphane Payen (saxophone) et Michel Blanc (batterie), mais comme le guitariste maîtrise l'anglais autant que l'occitan (il vit à Mende en Lozère) il a fait un montage dans le titre de l'album : ce sera "Push the triangle Cos la machina". Si le répertoire est en constante évolution, la plupart des titres sont des compositions collectives, Stéphane Payen ayant imprimé une énergie très rock. Un travail toujours en recherche de combinaisons rythmiques, de formes d'écritures nouvelles, assez contrapuntiques, une longue réflexion sur l'architecture des compositions. Ainsi Push the Triangle part de la matière sonore improvisée, avec des étapes d'écriture qui se développent sur cette base. Le travail d'enregistrement s'effectue sans pression, puisque seules les meilleures prise seront gardées, improvisations courtes, remontées ensuite grâce à la bonne vieille technique du multipiste. Du "cousu main" en somme, dans la logique des timbres et des textes.

Comme dans le précédent album, on retrouve encore des stridences électriques, mais plus du tout organisées sous une forme narrative, plus évocative, à l'exception du premier titre clin d'oeil "Recycling lilas" qui renvoie en effet aux albums de la Trilogie (dont le dernier album est à venir en décembre prochain). C'est une reprise de voix off effectuée par hasard durant la séance d'enregistrement, d'un des titres de "Looking for lilas", un recyclage involontaire en pleine improvisation avec Médéric Collignon. Celui-ci est invité pour le son qu'il obtient au cornet, qui s'ajointe à celui de Stéphane Payen ("Thôt") au saxophone : ainsi par magnétophone interposés, l'ensemble est saisissant et donne la part belle aux soufflants. Sans compter la voix dont Médo use comme d'un véritable instrument, sans paroles le plus souvent, par onomatopées.

S'attachant davantage à un travail sur les timbres, volumes et autres effets, Franck Vigroux délaisse un peu la guitare qu'il a pourtant magnifiée dans certains de ses albums prédédents : guitare douze cordes, fretless, ou acoustique. Son fil conducteur reste le désir de multiplier les sons, d'avoir le choix et pas seulement avec un seul et même instrument, d'être son propre arrangeur, de bidouiller avec les machines et l'électronique. Une musique hautement expérimentale au final, parfois aride, jamais dépourvue d'intérêt, dans un objet Cd à l'austérité de bon aloi. Longue vie aux projets de Franck Vigroux !