And the world ain't square

4 Walls

par Sophie Chambon le 30/05/2003

Note: 10.0    

Cela commence par un hymne anarchiste, où Phil Minton à gorge déployée décrit notre époque terrible et chaotique. On se croirait dans une satire à la Monty Python au temps héroïque du Flying Circus, mis en scène par le délirant Terry Gilliam. Il n’y a bien que ces diables d’Anglais pour donner aussi efficacement dans la subversion. Quatre murs qui forment un monde pas du tout droit (“4 walls and the world ain’t square”) et un groupe qui ne tourne pas rond en tous les cas. Atypique, si Phil Minton est chanteur, il est aussi un vocaliste prodigieux (il éructe dans "Pliers", râle dans "Bits of five") et fait penser à un Tom Waits survolté ou à un Captain Beefheart que Zappa ne contrôlerait plus. Monstrueux dans la dérision. Il y a quelque chose de bestial dans sa façon de hurler, siffler ou cracher les mots, apostropher, feuler dans cette langue, admirable pourtant de précision et de distinction. Il est suivi dans son délire par Veryan Veston, pianiste co-arrangeur, percutant et précisément incontrôlable. Qui semble toujours se réveiller pour démarrer de façon tonitruante. Le bassiste Luc Ex et le batteur Michael Vatcher sont tout aussi étonnants, martelant à corps perdu, en bonne rythmique qui se respecte. C’est que la cohésion est parfaite, et l’ensemble tiré au cordeau. Beaucoup de professionnalisme, de la virtuosité et pas la moindre fausse note dans ce récital déclamé, où plaintes, cris, éructations, halètements divers se succèdent dans le corps même des poèmes de E.E. Cummings, Adrian Mitchell et Michael Moore. Le disque est déjà saisissant, et sur une petite demi-heure très expressif de la performance réalisée par ces chevaliers du désespoir, à la drôle de figure. Alors on ne peut que conseiller d’aller voir partout où ils passeront ces quatre garçons inconséquents et invraisemblables…