Xieyi

Anders Jormin

par Sophie Chambon le 27/02/2002

Note: 7.0    

Xieyi est un album étrangement composite, fait de deux séries d'enregistrements comme s'en explique le contrebassiste Anders Jormin qui réalise ici son premier album sous son nom. Compositeur de la majorité de ces courtes pièces pour son instrument, il a intercalé des miniatures pour une section de cuivre, sur une suggestion du producteur Manfred Eicher. Ce qui rend la cohésion de l'album discutable mais qui a l'avantage de varier les timbres, les couleurs et d'atténuer cette tristesse sourde, cette épure très 'protestante', marque de fabrique du label ECM, austère s'il en est, à l'impeccable rigidité . 'Xieyi' en chinois a plusieurs définitions dont celle de donner du sens à la vie justement, mais le terme renvoie aussi à cette manière de peindre à l'encre librement, à grands coups de pinceaux. C'est ce qui a sans doute retenu l'attention du contrebassiste, la liberté de faire résonner de 'simples' chansons avec son instrument, de chanter des mélodies qui ont compté pour lui. Car il est d'abord question de chansons, de celles qui touchent, réveillent des souvenirs et font resurgir çà et là des émotions insoupçonnées parfois : le contrebassiste a choisi de reprendre des hymnes religieux scandinaves par Sibelius et Soderblom, des chorals, une pièce de la Chilienne Violetta Parra et une autre d'Ornette Coleman 'War orphans" qui l'a visiblement déjà inspiré puisque c'est le titre d'un précédent album. Pour garder la consistance naturelle, organique de ces pièces, l'enregistrement eut lieu, précise-t-il, en une seule fois, un après midi pluvieux de décembre 1999, dans une atmosphère proche de celle d'une église, The Organ Hall, à Göteborg. Près d'un an plus tard, les pièces pour cuivres étaient enregistrées à leur tour. Et on ne se trompera guère en affirmant qu'il règne dans cet album une sévérité douce et spirituelle, accentuée par la tonalité d'instruments particulièrement graves (trombone et trombone basse). Tout empreint de retenue non feinte, cet album d'une économie chic et 'peu tendance', dégage une 'sérénité', clin d'œil au pianiste complice Bobo Stenson avec lequel Anders Jormin a enregistré, toujours pour ECM.