Dilate

Bardo Pond

par Jean-Samuel Kriegk le 16/05/2001

Note: 8.0    
Morceaux qui Tuent
Two planes
LB.
Hum


Le label Matador était déjà responsable d'un des plus beaux émois du début du printemps 2001 : Stephen Malkmus, ex-chanteur de Pavement, dont les mélodies enchantées plongeaient dans une bonne humeur pré-estivale. Bardo Pond, autre signature du label, vient contrebalancer cette sensation. Car "Dilate", ce cinquième album, est à peu près aussi joyeux que le "Pornography" de Cure ou le "Berlin" de Lou Reed. Le disque commence par un long morceau instrumental, construit sur quatre accords, qui d'entrée cite les références du groupe : un violon plaintif évoque le John Cale du Velvet Underground, tandis qu'une rythmique lourde, portée par une guitare déchirante, rappelle Neil Young (dont l'influence quant à l'utilisation de la guitare est omniprésente sur ce disque). Les morceaux sont très longs, et l'architecture du disque comme la voix éthérée de la chanteuse (Isobel Sollenberger) rappellent étrangement le travail des islandais de Sigur Ros : lenteur, longueur des morceaux, spleen, et inventivité quant au son. Celui-ci est en effet tout à fait intriguant : la voix d'Isobel Sollenberger, parfois doublée ou bien nappée de réverbération, crée un véritable malaise, et le groupe définit un univers sonore décalé, à base de saturations, de parasites et de dissonances mêlés à des sons d'instruments très purs. Certains (rares) titres sont carrément minimalistes et se contentent de longues minutes de guitare acoustique et de synthétiseur avant de plonger dans le chaos ("Despite the roar"). Les influences orientales ("Swig") se mêlent aux progressions rock plus classiques, mais toujours absentes de clichés ("Two planes"). Tantôt bruitiste ou acoustique, post-rock ou prog-rock, hippie ou heavy, instrumental ou chanté, ce disque inclassable reste du début à la fin réellement inquiétant. Mais envoûtant. Ici, la beauté surgit de l'obscurité, et Bardo Pond invente le gothique psychédélique.