Moon rapping

Brother Jack McDuff

par Sophie Chambon le 26/05/2003

Note: 8.0    

Si la nostalgie existe, elle doit arriver par grandes bouffées à l’écoute de ce "Moon rapping" de 1969, année décisive, on le sait bien, dans la musique pop et rock. Côté jazz, ce n’est pas mal non plus. L’album d’Eugene Mc Duff, dit "Brother Jack" McDuff, flirte singulièrement avec la soul par l’énergie et le rythme. On songe aux films de la blackploitation, ou aux génériques de séries de la télé en noir et blanc. D’abord c’est ce son précis de l’époque que dominent guitare électrique et orgue Hammond. Si la guitare se fait discrète ici, Brother Jack manie l’orgue avec une confondante aisance, passant de climats éclatants à d’autres plus feutrés. Il tutoie volontiers l’astre poétique dans un "Moon rapping" un brin contemplatif, mais n’hésite pas à donner à son groupe l’arrière-plan nécessaire à la construction de thèmes exposés au saxophone ténor et à la flûte comme dans "Loose foot". Emporté par la rythmique de fond, il se laisse aller à broder de superbes ornements créant un mood chaleureux, irrésistiblement entraînant. C’est que tout invite à la danse dans cette musique sans prétention, qui coule sans le moindre effort, rythmée essentiellement (écoutez les roulements ininterrompus de Joe Dukes sur l’étonnant "Made in Sweden", composé sans doute lors de la tournée dans ces pays nordiques qui affectionnent tant le jazz). Et puis aussi à l’époque, capacité du vinyle oblige, les disques ne pouvaient pas s’étirer inutilement .Ces cinq pièces pas si faciles ne durent que 36 minutes : la juste durée, nécessaire mais suffisante, pour atteindre la planète "groove" !