Tierra fertil

Carlos Maza

par Sophie Chambon le 19/11/2000

Note: 8.0    

Avec ce dernier opus "Tierra fertil", le jeune pianiste chilien Carlos Maza (il est né en 1974 !), a su tirer profit d'un parcours mouvementé en exil, à Bordeaux et puis surtout à Cuba. Il reconnaît les mérites de l'éducation musicale sur l'île : un apprentissage continu, accessible à tous, avec un professeur pour cinq élèves. C'est là qu'il a rencontré son ami, le bassiste et violoniste du groupe, Carlos Malta. Quant au saxo, il n'a que vingt-deux ans et une maîtrise de l'instrument déjà époustouflante. Formation à géométrie variable, son groupe, où seul le batteur a un rôle fixe, improvise librement du début à la fin sans que la forme soit réellement jazz avec ses règles et ses grilles. Maza, véritable homme-orchestre, est partout : il passe du piano dont il joue en s'accompagnant au chant, à la kena ou au charango, ainsi qu'à la flûte de Pan (instruments traditionnels andins). Il reprend d'autant plus volontiers tous ces instruments, qu'ils furent des symboles culturels interdits par Pinochet. L'entrain de Carlos Maza, qui ressemble à un bacchus jovial, est communicatif. Il veut entendre le public répéter après les musiciens "Amigos de la musica", "Amigos de la tierra"... Il souligne le fait que sa musique est celle de l'espoir, avec des titres explicites: "Conga de esperanza", "El sur llega" (le sud arrive). Un morceau instrumental raconte une histoire à travers son seul titre et la musique parle alors d'elle même : "Me llamo charango", "Y soy de America", parmi les dix compositions de ce cd. Loin de renier ses origines qu'il revendique fièrement (IL EST UN INDIEN CHILIEN), l'affiche de la tournée et la jaquette du disque représentent une Amérique caraïbe des origines et du sud, où les gringos n'ont plus leur place ! Il a retrouvé son identité culturelle ("Qui suis-je ?" était d'ailleurs le titre de l'un de ses précédents disques). Une musique exaltée, libre et joyeuse où de très jeunes et talentueux musiciens, en se frottant aux diverses influences du folklore, du classique et du jazz, font surgir devant leur public une mosaïque colorée : le chant de la terre ancestrale.