The very best of Charles Mingus

Charles Mingus

par Sophie Chambon le 30/09/2001

Note: 10.0    

Encore une compil qui nous procure du bonheur, celui d’écouter quelques thèmes parmi les plus étonnants du contrebassiste, enregistrés entre 1956 et 1961, avec un personnel de rêve : Jacky McLean à l'alto, Booker Ervin au ténor, Roland Kirk à la flûte, au ténor et aux excentricités diverses, Mal Waldron ou Horace Parlan au piano et son fidèle batteur Dannie Richmond. Un collectif prêt à se lancer dans une aventure permanente sous la férule du chef, compositeur homme-orchestre, qui joue de la basse mais aussi du piano. Avec Mingus on peut s'attendre à tout ! Il a élevé la contrebasse au rang d'un instrument à part entière, lui faisant dépasser le rôle parfois ingrat de marquer les accords. Le contrebassiste chante la mélodie, duettise avec brio, rejoint le pianiste dans sa fonction d'accompagnateur, ou colore un solo avec une réinterprétation radicale du rythme. Quant au blues ou gospel songs, déjà clichés pour le public des années cinquante, Charles Mingus les revigore, détournant la plainte initiale, les lamentations-réponses au preacher, en une célébration vigoureuse. Selon l'humeur, il exprime joie ou rage, les deux parfois inextricablement mêlées. Ainsi sa version de "Moaning" popularisée par Art Blakey traduit un féroce appétit de s'exprimer et ceci, sans la moindre inhibition. Ajoutons encore la complexité des partitions où, en un ensemble impeccablement réglé, interfèrent les mélodies des souffleurs, de la basse et du ténor, dans le remarquable "Wednesday night prayer meeting" de l'album "Blues and roots". Sans oublier les interventions plus 'sauvages', chantées, marmonnées, reliées aux inventions de Kirk qui font des trois derniers des titres de l'album un happening avant l'heure ! Une improvisation collective qui malmène le travail soigné de composition, une tendance impulsive à rechercher un certain désordre que l'on met en scène. Toujours l'expérience fondamentale des églises de son enfance. Un embrasement que l'on partage alors que cette sélection bien choisie finalement, laisse de côté les moments plus tendres et rêveurs comme le sublime "Good bye pork pie hat" !