Fire and skill : a tribute to The Jam

Compilation

par Francois Branchon le 08/11/1999

Note: 6.0    
Morceaux qui Tuent
Going underground (Buffalo Tom)
To be someone (Noël Gallagher)


Quelques groupes jalonnent l'histoire de la pop anglaise, réputés réservés à la compréhension et à l'estime des seuls anglais et - conséquence - hermétiques aux sens gaulois : le "trop anglais pour marcher ici" sonnant comme le couperet de cette guillotine médiatique, qui trancha clair et net les têtes des Kinks dans les années soixante, trop fines anguilles entre les rochers Beatles et Rolling Stones, ou à la fin des seventies et débuts des eighties, celles de XTC et Elvis Costello. et Jam, bourrées de mélodies d'apparence anodines et semblables, pourtant fils d'Ariane d'une musique démarrée sous emballage punk, puis progressivement parvenue à l'essentiel : la parfaite chanson de trois minutes bien tournée. Sous l'égide de Paul Weller, le power trio Jam laisse donc la France froide mais enflamme l'Angleterre pendant cinq ans et six albums. Moins radicaux et clairement engagés sur des terrains politiques que Clash, les Jam ont aussi leurs combats, en particulier contre le star system ("To be someone") et la presse musicale qui va avec ("A bomb in Wardour street"). Clairement influencés musicalement par les Who des débuts (période "Sell out" et "Magic bus") et le mouvement Mod de cette époque, ils ne ressortent pas les Vespa mais accordent une place non négligeable à l'attitude, ressortant les Rickenbacker noires, réaffichant une élégance mise à mal par la vague punk (retour du costard noir-cravate et pompes bicolores), le tout fait cependant avec suffisamment de classe pour ne jamais perdre de vue l'essentiel : la musique et surtout la pêche qui va avec. Et de fait - heureux pays l'Angleterre qui sait allier succès commercial et qualité - les tubes s'enchaîneront : "The modern world", "Town called malice", "Going underground", "English rose" et peut-être le meilleur, le parfumé de soul "That's entertainment". Disparus en 1982, les Jam ont été passablement pillés depuis, ne manquait que l'album hommage, le "tribute" pour célébrer officiellement la mort. Celui-ci se décline sous influence Oasis, Liam Gallagher ouvrant les hostilités et Noël les fermant. Entre eux deux, neuf groupes aux reprises variables (loi du genre). "Carnation" n'était pas la chanson la plus marquante de l'album "The gift" (1982) mais le duo Steve Cradock (Ocean Color Scene) et Liam Gallagher en donnent une version assez convaincue qui, ironie, ne déparerait pas dans les "Revolver" ou "Rubber soul" des Beatles. Noël Gallagher l'aîné transforme la charge anti pop stars "To be someone" de l'album "All mod cons" (1979) en ballade comptine acoustique (très réussie). Les autres : les Beastie Boys font de "Start !" ("Sound affects" 1980) une pièce easy listening pour bar chic assez désolante. Du même album, Reef ramène au ras du sol "That's entertainment", incapable de restituer l'essence soul de l'original. Heavy Stereo avec "The gift" et Silver Sun avec "Art school" ("In the city" 1977) imitent les maîtres, lorsqu'arrive "English rose" par Everything But The Girl, dont on n'a qu'une envie : les prendre par le col et les passer par le balcon, tant leur style asthmatique est hors sujet à propos de Jam. Heureusement, Buffalo Tom leur succède, avec une version plus lente, moins urbaine de "Going underground" ("Sound affects"), mais les bostoniens en ont parfaitement pigé l'esprit et sonnent bien plus "british" que les anglais de la compilation. On passera sur Garbage et un "The butterfly collector" mais style hors sujet), Ben Harper et Gene (photocopies sans intérêt de "The modern world" et "Town called malice" qui auraient mérité mieux). Contrevenant aux lois du genre, Paul Weller (morceau caché !) rejoint la procession de ses propres funérailles avec une reprise de son "No one in the world".