Kapital : New York City

Compilation

par Martin Dekeyser le 16/02/2002

Note: 9.0    

Kapital - New York city inaugure une série de compilations consacrées à la scène underground et électronique d'une grande ville du monde. Les groupes ou artistes ici sélectionnés ne sont pas pour autant tous new-yorkais (Adult est de Détroit, Green Velvet de Chicago, The Kitbuilders de Cologne...), mais sont représentatifs de la Grosse Pomme, lieu de tous les métissages, de toutes les réunions et expérimentations possibles et imaginables. Sorti chez Universal France, "Kapital - New York city" est un véritable ovni musical à la playlist quasi irréprochable (à l'exception du Dvd contenant un reportage sur New-York anecdotique voire emmerdant). De nombreux styles sont abordés, des groupes peu connus mis en valeur, le tout dans une ouverture d'esprit rare. Plus de la moitié de la compilation est constituée de productions électro en lignée directe de Kraftwerk et Giorgio Moroder. Les féministes ou pseudo-punks sont dignement représentés par Le Tigre (cf la chronique de Luz dans Sefronia), Peaches and Gonzales (mari et femme) et Sylvester Boy (recrue masculine des excitées Chicks on Speed). Ils (et elles) allient une électro plus ou moins explicite à des discours on ne peut plus clairs portant tantôt sur la reconnaissance des gays ou la lutte contre le sacro-saint capital. A côté, les chiennes de garde font figure de toutous dociles (si je puis me permettre mesdames...). Le côté glamour et rétro (kitsch) dont la visibilité est maintenant maximale (depuis Miss Kittin & The Hacker notamment) ne squatte pas, heureusement, la quasi intégralité de la compile. On passera rapidement en revue le clone de Visage (Inform3r), la barbie sexy version vinyle (Katya d'Hong Kong Counterfeit), le martien Green Velvet et les performances/provocs de Fischerspooner ("Emerge") pour s'éclater sur la réinterprétation électro-sexy du "I was made for loving you" de Kiss par Queen of Japan. Toutes ces formations redynamisent la scène et dérouilleront les jambes des plus endurcis du dance-floor. Au niveau des découvertes, on élargit le champ du downtempo à une scène new-yorkaise fraîche qui le nourrit d'influences nouvelles (The Merkin Dream séduira les fans du lo-fi à la Yo-La Tengo) voire de productions délicates à la Thievery Corporation (Lypid remixé par Fila Brazillia). On se réconcilie avec le hip-hop, enrichi désormais de sonorités plus sombres et industrielles (Cannibal Ox, Techno Animal feat. Toastie Taylor). On redécouvre que c'est dans les bonnes vieilles casseroles qu'on fait les meilleures tambouilles (TRS-80, du nom d'une machine ancêtre du PC). Enfin, on imagine ce que pourrait être une électro hésitant entre Suicide et Juan Atkins (A.R.E. Weapons et Adult). Les ancêtres sont également présents puisqu'on retrouve avec bonheur la disco des quatre sœurs d'ESG, les collages sonores de Meat Beat Manifesto et la new wave de Tuxedomoon remixée par Hans Platzgumer (membre de Queen of Japan). L'horizon est total dès lors qu'on mentionne la présence de l'electronica berlinoise de To Roccoco Rot, des expérimentations déjantées de Khan ou de la house-disco de Playgroup (alias Trevor Jackson, patron du label Output et remixeur talentueux). Un menu fort chargé et aux coudées larges qui ravira aussi bien les amateurs de découvertes sonores que les vieux briscards de la cold wave et de l'indus. Le site associé reprend les parcours des artistes et donne des adresses intéressantes à New York. Vivement les prochains volumes consacrés à Berlin, Paris, Londres et Tokyo !