The Dead 60’s

Dead 60's

par Chtif le 22/01/2006

Note: 9.0    
Morceaux qui Tuent
Control this
A different ace


Le premier album des Dead 60’s est sorti en mai 2005. Délai déjà conséquent en ces temps où quelques semaines seules suffisent pour pondre un single rapidement monté aux nues, récolter la palme de "minet du mois", puis retourner zoner dans le caniveau une fois la hype passée. Dans ce contexte hautement concurrentiel, les Dead 60’s sont relativement passés au travers des gouttes :
disque apprécié, médiatisation raisonnable, et survie en milieu hostile. Aujourd’hui les journaleux à la gâchette facile ont d’autres Arctic Monkeys à fouetter, et l’on peut aborder sereinement ce disque, sans s’embarrasser de comparaisons inutiles.

Le sticker collé sur le boîtier mâche bien le boulot d’investigation : "4 lads de Liverpool qui revisitent l’esprit des Clash, des Specials ou de King Tubby". Une fois le CD enclenché, force est de constater qu’on ne s'est pas fait voler sur la marchandise : d’emblée, "Riot radio", taillée pour le dance-floor, balance un groove infaillible sur fond vintage. Basse généreuse, guitare ska efficace, pas de doute, le mélange disco-punk (qui sonne tout de même moins 60’s que 70’s) est une valeur sûre du moment. Beaucoup l’ont compris (Franz Ferdinand, Bloc Party, presque tous en fait), mais nos jeunes anglais se démarquent en insufflant dans leurs compos une large dose reggae-dub du meilleur goût.

Et pourtant l’exercice est difficile : combien de pénibles formations s'enlisent en jouant à tirer plus fort que le voisin, jusqu’à s’endormir sur leur ligne de basse? Les Dead 60’s (qui se sont enfermés huit mois durant pour "apprendre à jouer comme les Wailers") réussissent le grand écart entre évocation jamaïcaine et identité urbaine : la violence de la rue est au cœur des préoccupations, et aucun "Rastafaraï Babylone !" ne vient perturber le propos. La reverb défie les lois de la pesanteur, cernée par des nuages d’orgue extatique et de sons plus étranges les uns que les autres. L’instrumental "We get low" constitue à ce titre une plage de répit bienvenue quand à ses côtés sévissent de virulentes mises à l’index, tels le très punk "New town disaster" ou l’angoissant "A different ace", surprenant par son chant vindicatif dans une atmosphere à la "Killing an arab" de Cure.

Impossible de se lasser : presque tous les morceaux sont bons et la durée de l’objet idéale (35 minutes). On se délectera notamment d’un petit bijou de concision, "Control this", qui, en 2 minutes 14 secondes et 5 notes d’orgue, envoie une énergique mélodie enfantine, naïve, à l'opposé de la rudesse sociale du texte. De quoi mettre à genoux tous les rude boys de la planète. A défaut d’innover, The Dead 60’s offre un sérieux palliatif en cas de coup de blues, à conserver pas loin de son exemplaire de "London calling".