Flûtes solo - La Traversée

Dominique Bouzon

par Sophie Chambon le 06/01/2004

Note: 9.0    

Voyage intérieur, rivages inconnus abordés.... Rêve ou réalité ?

Dominique Bouzon voyage dans et sur le souffle, qui, d'éphémère devient durable, en faisant parvenir des voix chuchotées, des vibrations graves. Le souffle du vent en effet accompagne de mystérieuses images, raconte à notre imaginaire sa traversée dans les espaces et le temps. Ses flûtes empruntent jusqu'aux formes d'un bestiaire fantastique : serpentine, salamandre, Mélusine ondoyante, sirène, dauphin, goéland...

Cette femme plurielle devient orchestre à elle seule, mettant en scène des pièces réécrites pour plusieurs flûtes à la fois, à l'aide d'un support "acousmatique". Jeu de miroir sonore et de réflexion sur l'instrument, ce travail d'écriture considérable (deux compositions seulement sont reprises du répertoire jazz) est plus une réflexion sur le souffle qu'un disque de flûtiste. La belle famille des traversières : piccolo, grande flûte en ut, alto, basse et octobasse, rassemble ses cinq membres en les superposant (certaines pièces nécessiteraient douze flûtistes pour être jouées en direct) offrant des possibilités sonores très étendues : du tambour africain (coeur du rythme) au vent de la flûte arabe (ney) jusqu'à des petit pas d'un oiseau. On croit entendre toutes sortes d'instruments ethniques, indiens ou amazoniens qui "persiflûtent" entre eux, selon le joli mot de Dominique.

Avec la fluidité d'un discours qui se veut aussi percutant, elle utilise toutes les techniques connues : slap à la flûte basse, voix-instrument à l'unisson, chant, pizzicato, jeu de langue, timbre de clés. Un cas insolite, une première dans l'histoire de la flûte consiste à trouver des lignes de basse à l'octobasse sur "Just friends", en référence à Chet. Dans le spectacle créé à partir de l'album, intitulé "Traversières", les compositions sont construites de la façon suivante : les parties qui ont servi de point de départ sont jouées en introduction solo, puis les flûtes interviennent en tuilage pour laisser les solos improvisés s'épanouir en direct. Plongée au coeur de la forêt des sons, cette nymphe respire librement en nous inspirant le même sentiment.