Lux aeterna

Eddie Clearwater

par Sophie Chambon le 28/03/2003

Note: 8.0    

On pourrait se demander comment le jazz marque de son empreinte, "Lux aeterna", du guitariste multi-instrumentiste Terje Rypdal, si ce n'est que cette oeuvre importante en cinq mouvements a été commandée par le festival de Jazz norvégien de Molde pour célébrer l'orgue nouvellement installé dans l'église de la ville. Encouragé par l'ancien directeur du festival, Terje Rypdal a travaillé dans ce sens, reprenant le second mouvement de son double concerto pour aboutir à une écriture concertante où guitare-orgue-trompette s'ajoutent aux cordes, piano et percussions du Bergen Chamber Orchestra et à la voix céleste d’Åshild Stubø Gundersen, soprano dont le timbre souverain renforce la plénitude orchestrale. On ne peut nier l’aspiration mystique qui préside à cette création, la communion avec la nature et en particulier les montagnes chères aux Nordiques. Il y a décidément chez ces Vikings un réel attachement aux éléments. Le second mouvement "Fjelldappen", littéralement "Baptisé par les montagnes", évoque un souvenir de jeunesse de l'auteur, et traduit la fascination mêlée d'effroi de Terje Rypdal lors d'une ascension vécue alors, chemin initiatique vers ces sommets qui enferment tels une cathédrale. On comprend que le projet, exaltant dans son austérité même, ait séduit le producteur d'ECM , Manfred Eicher. Tout en explorant les ressources de l'orgue, Terje Rypdal a créé une oeuvre singulièrement attachante, d'une douceur subtile dans "Escalator", où la guitare exulte, lyrique et tendrement flamboyante dans le second mouvement alors que la "Toccata" excelle à rendre de façon contrastée cette ardeur que seul le final viendra tempérer, dans un mouvement de réconciliation et de consolation bienvenues.