... And star power

Foxygen

par Jérôme Florio le 08/11/2014

Note: 5.0    

"… And star power" n'est pas précisément une ode à la précision et à la modération : véritable labyrinthe sorti des cerveaux de Jonathan Rado et Sam France, c'est un double album qui montre un groupe en équilibre précaire, un peu claustro, un genre de MGMT qui n'aurait jamais vu la lumière du soleil.

Foxygen essaie d'accrocher l'auditeur dès "How can you really" et "Coulda been my love" : les arrangements sont à la fois recherchés (piano, cuivres) et étriqués (un son chétif genre home studio de récup', des voix remisées au fond du mix). Ces deux essais de pop solaire tournent cependant vite court. L'auto-production, c'est bien, à condition de ne pas tomber dans un gros travers : l'auto-indulgence. Foxygen en fait l'aveu direct : "Can't contextualize my mind", que l'on peut lire comme l'incapacité de choisir, le manque de discernement. Le disque sombre rapidement dans un dédale interminable où se télescopent science-fiction ("Star power nite"), sonorités garage pré-punk et séries Z ("Cannibal holocaust", très calme au vu de son titre emprunté à un sulfureux film gore italien), le tout dans un zapping permanent qui cultive l'inconfort. Le concept du disque, dérive sur une station de radio totalement barrée, est un alibi bien pratique pour donner l'illusion d'un semblant de cohérence.

L'auditeur doit frayer son chemin entre petites pépites néo-garage ("Brooklyn police station"), et emprunter nombre d'impasses. "Cosmic vibrations" se retire à la cave et se tape la tête contre les murs ; "You & I" est une piqûre de rappel du son du Velvet Underground (les chœurs, les guitares, la voix un peu fausse et fragile) ou "Freedom II" en version plus brute. Le genre du pastiche et de la référence est un fil rouge potentiel : désolé et pathétique à la Syd Barrett ("The game"), Suicide (le plutôt marrant "Hot summer"), ou Stooges (pour les hurlements et les rythmiques qui cherchent la bagarre d'un air mauvais)… Même les Doors, avec ce clavier aigrelet omniprésent, pourraient être de la fête.

Il faut reconnaître à Foxygen la capacité à faire sonner leur groupe rock assez basique de plein de manières différentes (jusqu'au quasi-synthétique "Mattress warehouse", encore trop diluée). Il subsiste l'impression globale d'une trop longue jam session, à la fois potache et exaspérante, une sorte de créature de Frankenstein sonore couturée de toutes parts.



FOXYGEN How can you really (Clip 2014)