Benzine

Franck Vaillant

par Hugo Catherine le 23/12/2005

Note: 9.0    

"Benzine" est un réservoir de barils comtemproniques. En effet, lorsque Franck Vaillant est au plus haut de son puit, il y jette des mélanges exquis de sons électroniques et de musique contemporaine : l'électronique pour la rythmique, le contemporain pour les parties mélodiques. Les pistes de "Benzine" ne sont jamais aussi touchantes que lorsqu'elles maintiennent ce double cap. Parfois, la tendance électronique, version expérimentale, prend le dessus. Nous n'y perdons certes pas en qualité sonore mais peut-être quelque peu en puissance créatrice du projet.

L'album est souvent un forage explosif de sons, à la fois d'origines naturelles (voix samplées, croassements de corbeaux, grillons lointains) et industrielles (machines d'usine). Parfois pourtant, "Benzine" privilégie la douceur. Les bruits paraissent alors en retrait, quasi-annexes, aphones même, à l'image de ces bruits de rues qui envahissent le soubassement sonore de certaines compositions. "Benzine" peut à la fois réjouir les adeptes du label Rephlex et les fondus de musique concrète.

Si cet entre-deux doux-explosif produit une atmosphère mystérieuse et hululante, l'efficacité des morceaux n'est pas à prouver. Franck Vaillant, en digne batteur, touche du groove en deux ou trois bricolages électroniques et un ou deux nappages mélodiques. L'arrivée de la pulsation ne fait jamais défaut, contrairement à une grande partie des projets électroniques expérimentaux actuels, cherchant à se jouer du soi-disant carcan du beat. Les clics et les sonneries de Franck Vaillant ne snobent aucunement la musique électronique robotique, si nous en jugeons par son utilisation ponctuelle de mélodies simplistes ou encore de voix outrageusement répétitives.

Enfin, "Benzine" est éminemment poétique. Les paroles astéroïdales d'une des pistes font d'ailleurs office de sombre incantation : "tu dévales le vide, sans poids, sans attraction, emporté par ta propre masse". Le défi de Franck Vaillant est de nous donner à entendre une bande-son mondiale d'où émerge un sentiment grinçant de retour de voyage. Il y parvient au mieux lorsqu'il donne toute leur place aux intermèdes mélodiques périodiques qui s'insèrent avec évidence entre les bris de glace et les sourdes frappes percussives.