Ostinato

François Raulin

par Sophie Chambon le 13/12/2009

Note: 9.0    

On a beaucoup de raisons d’aimer ce disque : François Raulin déploie un enthousiasme communicatif pour parler du jazz et en jouer, un sens certain de la mélodie et de l’harmonie, une vraie science des arrangements. "Ostinato" est son deuxième album solo, qu’il sort sur le label La Forge, production grenobloise avec lequel le pianiste continue un travail collectif d’improvisations.

Traversé par un désir constant de musique et de jeu, ce pianiste nous fait partager son goût des belles mélodies qui restent en mémoire comme une évidence. Ainsi en est-il du "Lotus blossom" du merveilleux Billy Strayhorn, alter ego du Duke, compositeur de quelques uns des plus beaux standards de l’histoire du jazz, qui, sous les doigts du pianiste, devient la mélodie épurée d’un film imaginaire, minimaliste et émouvant. Un ostinato ? Une figure répétée pendant une partie ou tout un morceau, qui remplit un rôle expressif. L’album porte bien son nom, car la douce insistance, la subtilité harmonique, le choix des demi-teintes allié à un sens rythmique rigoureux et souple sont la marque de la musique de François Raulin.

Une élégance musicale irréprochable, qui gagne au fil des thèmes en intensité et en force persuasive, les tempos étant habilement alternés : d’un premier titre très doux, "Little Nemo s’éveille" où le piano cristallin commente à mi-voix, on passe sans effort à "L’appel de la forêt" précis et délié, ou à des compositions alertes, plus tendues, voire entêtantes, "Ziggedi". Virevoltants ou obsédants, mais toujours lyriques, ces thèmes entraînent vers une intimité partagée, chez soi, ou entre amis. Après un "Roulé-boulé" très nerveux, on finit cette promenade musicale sur "Images de décembre", une ballade de circonstance où domine cette impression ouatée et floconneuse, persistante, sans éclats trop vifs, de ritournelle sous influence. On reste avec cet "Ostinato" sous l’emprise de ce pianiste, et ce, pour notre plus grand plaisir.