Beautiful

Garbage

par Olivier Vancaemerbeke le 24/10/2001

Note: 8.0    
Morceaux qui Tuent
Androgyny
So like a rose


Peut-être pour remercier les fans de leur patience, le troisième Garbage a été proposé dans un joli digipack hexagonal transparent, lové au centre d'une rose dépliable. Plus facile à ouvrir qu'à refermer d'ailleurs, mais a-t-on vraiment envie de ranger le disque ? Car, des roses justement, Shirley Manson et sa bande en méritent. En treize titres, ils prouvent qu'ils n'avaient pas tout dit. Avec "Beautiful" on retrouve certes leur son unique né d'un croisement improbable entre la pop et l'électronique, mais réinventé. "Beautiful" est incontestablement un album plus pop et plus rock que les deux précédents. Comme si, après avoir ouvert la voie, le groupe entendait revenir à ses fondamentaux. Personne ne peut oublier que Butch Vig, préposé aux triturages sonores est aussi - sinon avant tout - un producteur 'rock' réputé ("Nevermind" de Nirvana, Smashing Pumpkins, U2, Beck, Alanis Morisette, Korn...). Mais plus qu'un son brut, ce qui frappe surtout c'est le supplément d'humanité (on n'ose pas dire d’âme tant l'expression est galvaudée) qui transpire de ce "Beautiful". Garbage s'est sans doute lassé d'avoir joué à fond avec son précédent album la carte de la technologie ("Version 2" pour le titre, pochette aseptisée, photo de Shirley en veste style Cosmos 99, numéros des titres des chansons précédés de quatre zéros pour "faire genre" informatique...). Loin du son bigrement efficace mais un peu mécanique de "Version 2", Garbage se montre cette fois plus humain mais aussi plus audacieux. "Shut you mouth" en ouverture prend aux tripes, tant la voix de l'Ecossaise Shirley se fait hargneuse, "So like a rose" étonne par son dépouillement velvetien, "Cherry lips", pop song guillerette, évoque un peu les Breeders ou No Doubt, "Drive you home" est introspectif et planant, mais "Parade", toutes guitares en avant, sonne comme du Veruca Salt... Le groupe reconnaît avoir eu du mal à arriver au terme de cet album, mais on comprend bien que c'est pour avoir emprunté bien des chemins de traverse. Lors de la sortie du premier album de Garbage en 1995 le groupe avait créé l'événement en démontrant qu'il était possible de faire du rock indépendant et de qualité en ayant recours à un vaste panel de samples et de boucles rythmiques. En un mot Garbage cuisinait sa pop-rock avec les ustensiles de la danse. Mais, à la différence du schéma adopté dans la techno où l'on "découpe" les disques existants, Butch Vig insistait sur le fait que c'était essentiellement leurs propres riffs, patterns et lignes de basses qu'ils trituraient. Avec "Beautiful", le groupe pousse la dialectique encore plus loin. Le Cd contient en effet une partie multimédia absolument inédite à ce jour. En l'installant, l'auditeur découvre trois sampleurs (un offline et deux online). Ce petit programme donne accès à une impressionnante bibliothèque de samples des titres de l'album. Ceux-ci, classés par catégorie (voix, basse, keyboard, batterie) permettent de créer un morceau complet par simple glissé-collé. Si vous êtes fier de votre création vous pouvez la sauvegarder et la faire partager aux autres internautes via un chat qui s'ouvre en même temps que le programme de création de morceaux. Le groupe vient d'inventer les "vrais-faux" titres de Garbage ! Espérons toutefois que leur prochain album ne soit pas entièrement en kit.