Album

Girls

par Jérôme Florio le 07/11/2009

Note: 8.0    
Morceaux qui Tuent
Laura
Darling
Hellhole ratface


Entre ligne claire et ligne poudreuse, la pop accrocheuse des Girls fait mouche à plusieurs reprises. Christopher Owens et JR White affectent une attitude de branleurs qui ont réussi leur coup, sur un premier disque qui passe par-dessus tous les gimmicks comme par magie.

Avant de former les Girls avec JR White à San Francisco, Christopher Owens a joué dans des groupes punk et a vécu en Floride de petits boulots – sa voix un peu pâteuse donne l'impression bizarre d'entendre un Sid Vicious bronzé dégoisant "My way" de Frank Sinatra. Le duo égrène ses influences comme le Petit Poucet ses cailloux blancs, avec suffisamment de malice et d'innocence pour que le jeu de piste ne se transforme pas en catalogue. White et Owens marquent une nette préférence pour une pop très mélodique, parfois à peine salie par des guitares massives et fuyantes © My Bloody Valentine ("Morning light"). "Big bad mean motherfucker" évoque des Beach Boys qui auraient encastré la planche de surf dans un mur de guitares ; l'intro rythmique de "Ghost mouth" rappelle les "girl groups" (pas étonnant) du début des sixties (The Ronettes...). Le son des Girls doit surtout sa patine aux années 80 et 90 : un petit clin d'oeil à Prince ("Ghost mouth"), clarté mélodique héritée des frères Head (Pale Fountains, Shack) sur le trop bien nommé "Headache" ; et la guitare de JR White tresse des guirlandes autour de la mélodie comme celle de Maurice Deebank (Felt).

Il y a trois stations essentielles sur le disque. D'entrée de jeu "Laura", single évident qui se loge direct dans les oreilles grâce à des idées pas franchement neuves : un enchaînement couplet-refrain imparable (chant exalté, rythme haché à la "Jean Genie" de David Bowie), et alors que la chanson menace de tourner court, la fin planante oblige les shoegazers à arrêter de fixer leurs pompes pour admirer les étoiles dans les yeux des filles... A mi-parcours, "Hellhole ratface" répète deux phrases comme un mantra, et la sauce monte durant sept minutes avec clochettes, guitare surf, harmonies vocales... donc encore les Beach Boys, comme plus loin sur "Lauren Marie". Enfin, le dernier titre "Darling" est celui qui achève la touche "Repeat" de la platine Cd, une vraie ritournelle pop crève-coeur sur le mode "my life was saved by rock'n roll". A l'adolescence, Christopher Owens a trouvé la volonté de s'échapper de la secte des Children Of God, à laquelle appartenaient ses parents : comme le chantait Lou Reed, Christopher a été sauvé par le rock'n roll plutôt que par une grâce bidon.    

Une écriture au final assez peu variée nous amène à penser que le flirt avec les Girls ne risque de durer que le temps d'un disque - une affaire d'un soir, où plaisir immédiat et nostalgie précoce se mêlent agréablement.



GIRLS Laura (Live at a Different Fur 2009) © Nate Chan & Will Abramson