Bye bye 17

Har Mar Superstar

par Fabien Gabaig le 28/11/2013

Note: 6.5    

Vers le début du millénaire, le monde du show biz accueille parmi ses membres Har Mar Superstar, un personnage rondouillard atteint de calvitie, toujours prompt à cavaler dans les talk shows chaussé de mocassins et vêtu d'un simple slip. A cette époque, son talent éclot sur les plateaux télé dans des calices de danseuses topless, en nocturne, au milieu des strings à paillettes et des boas de plumes couleur flamant rose. Dans les interviews, Har Mar décrit volontiers sa musique comme du R'n'B ouvertement sexuel et brutal. Pour ses concerts, il se présente souvent affublé d'une robe de gospel ou recouvert d'innombrables couches de vêtements. Il multiplie les pas de danse, les acrobaties, transpire abondamment et exhorte le public féminin à accomplir sur sa personne un effeuillage rituel durant le spectacle. Régulièrement, il finit dans le plus simple appareil. Dans l'Oklahoma, dont la culture protestante rigoriste n'est plus à démontrer, suite à un nouvel accès d'exhibitionnisme, il réédite l'exploit réalisé par Jim Morrison et se fait coffrer pour comportement obscène en public. Har Mar ne voulait pas vraiment choquer, c'était juste pour le fun mais visiblement, les autorités, cinquante ans après l'épisode Morrison, ne s'étaient toujours pas émancipées de l'esprit des lois fédérales. Enfin bon, passons... 

"Bye bye 17", son nouvel album, peut être considéré comme un hommage sincère rendu à la soul music. Har Mar possède un vrai talent d'interprète et son disque, qui est équipé d'une section cuivre souvent rutilante, de choeurs suaves gentiment érogènes, reste dynamique de bout en bout. Les deux premiers morceaux sont d'ailleurs très bons. "Lady, you shot me", dont le titre fait explicitement référence aux toutes dernières paroles de Sam Cooke, démarre comme un solo de crooner un peu triste pour se propulser rapidement dans des envolées soul de toute beauté. Quant à "Prisoner", c'est un honorable pastiche de Stevie Wonder, avec ce son de clavier très seventies, devenu mondialement célèbre depuis "Superstition". En un mot, irrésistible. La suite, c'est peut-être un peu moins bien. Pas mal de ballades pop qui fleurent bon la soul et l'esprit Motown. Des morceaux capables d'égayer la bande FM, ce qui est déjà pas mal, et qui seraient parfaits pour des BO de comédies sentimentales ou des productions de Judd Apatow... 

Dans le civil, Har Mar Superstar, plus modestement, s'appelle Sean Tillman. Il est américain et s'il a choisi cet étrange pseudo, c'est parce que dans son Minnesota natal, il y a un centre commercial baptisé le Har Mar Mall ; Sean y allait quand il était petit et il a toujours trouvé le nom super. Le reste, c'est pour la rime (ou pour la frime, mais on n'est pas à un détail près). Tout le monde n'a pas le génie de Stevie Wonder, le sex appeal de Prince ou le jeu de jambes de Michael. Encore moins les trois à la fois et ça, c'est un truc que Sean a pigé très tôt. L'autre jour, on en a discuté au supermarché devant le rayon des barres énergétiques et on est tombés d'accord : la vie est essentiellement parodique.


HAR MAR SUPERSTAR Lady, you shot me (clip officiel)



© Pochette d'un 45 tours de Nancy Sit (1970) - Nancy Sit était une chanteuse et actrice chinoise très populaire dans les années 60. Har Mar lui a tout piqué : le titre et la pochette.
Nancy Sit était une chanteuse et actrice chinoise très populaire dans les années 60. Har Mar lui a tout piqué : le titre et la pochette.