Les multinationales s'apprêtent à dégraisser à tout va, mais la pop internationale ne connaît pas la crise : Hjaltalin emploie pas loin d'une dizaine de membres, dans un ensemble d'instruments à cordes (violon, violoncelle, piano...) et à vent (basson, clarinette, trombone, trompette...) en plus du trio traditionnel guitare-basse-batterie. Les Islandais ne sont pas les premiers à remettre en question la composition du groupe pop ordinaire. On peut remonter jusqu'à l'onde de choc originelle des Canadiens Arcade Fire, puis les rapprocher de Beirut, Le Loup, Bowerbirds...
La musique de Hjaltalin est enlevée, fraîche et mélancolique, traversée par des bourrasques de cordes et de choeurs. Chant en canon à deux voix, en anglais et en islandais, sur des chansons clairement pop mais arrangées pour des instruments classiques : cela fait davantage penser à Shelleyan Orphan (Caroline Crawley et Jemaur Tayle) - une madeleine qui commence à dater (*) - qu'à la gaieté hippie-scout forcée des Suédois de I'm From Barcelona (cela affleure pourtant à la fin de "Traffic music"). Les Anglais de North Sea Radio Orchestra ont une démarche semblable ("Sleepdrunk seasons I"), mais ils sont trop nichés dans leur culture nationale pour toucher un large public.
"Goodbye july/Margt ad ugga", petit tube indé chez eux, représente bien Hjaltalin : une musique balayée par des sentiments contraires, avec une pointe de gravité douce-amère mais désireuse de s'ouvrir au monde. La poussée de sève des guitares est contenue par une écriture rigoureuse, qui passe par une orchestration colorée. On ne sait pas trop comment Hjaltalin finira sa mue, mais on prend avec plaisir l'occasion qui nous est offerte de faire souffler un petit air printanier, fût-il islandais, sur notre hiver bien rigoureux.
(*) Après quinze ans d'absence, Shelleyan Orphan a sorti un
nouveau disque en 2008, "We have everything we need" (One Little
Indian)
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