Turn on the bright lights

Interpol

par Filipe Francisco Carreira le 12/10/2002

Note: 9.0    
Morceaux qui Tuent
Obstacle 1
Stella was a diver and she was always down
Roland
The new


Les mauvaises langues parleront avec dédain de l'éternel retour des années 80. Seulement il n'y a jamais eu de retour ou de réhabilitation au sens propre des années 80 ! Ce qui passe pour "la mode des années 80" n'est qu'une saloperie, une réhabilitation odieuse et à peine déguisée des "Démons de minuit", une culture du second degré détestable. Et si la musique d'Interpol reste assez référencée - l'intro de "Roland" rappelle "Shadowplay" de Joy Division et "Say hello to the angels" débute comme "London calling" des Clash avant d'évoquer les Smiths - le gang new-yorkais combine tous ces éléments avec fougue, panache et flamboyance : la beauté glacée de Joy Division, la grâce mélodique des Smiths et l'électricité rageuse des Clash, le tout agrémenté d'ambiances caverneuses et malsaines comme seul Sonic Youth savait en imposer. Si le trompeur et faussement serein "Untitled" en ouverture révèle une voix, celle ample et détachée de Paul Banks, chanteur énigmatique, habité et lettré, "Obstacle 1" révèle un groupe de rock’n roll élégant et puissant à la fois, arrogant et désespéré. Fait de cassures et d'accélérations pied au plancher, "Obstacle 1" s'écoute en voiture, la vitre baissée et la poitrine gonflée par la fierté d'écouter le disque du moment à fond la caisse. Contrairement à ce que son titre prétend, "Obstacle 2" n'est pas une suite mais partage avec son prédécesseur une intensité trouble, une aura et un mystère que les écoutes successives ne font que renforcer. Riches en symboles et en images fortes, les mots de Paul Banks parlent de désir et de perdition et proposent plusieurs niveaux d'interprétation comme sur ce "Stella was a diver and she was always down" où ce nom - Stella - et cet aveu - "I love you" - sont scandés jusqu'à ce que l'incantation, déjà bouleversante, ne prenne une tournure apocalyptique. "Roland" électrise, "The new" pétrifie et "Leif Erikson" s'enflamme avant de se consumer dans un silence cruel, un silence de mort qui ne donne qu'une envie : rallumer la mèche. Par ailleurs - et c'est encore un des attraits de ce disque - "Turn on the bright lights" n'est pas parfait. Il est seulement foudroyant. Tout porte à croire qu'Interpol, affranchi de ses influences, surpassera ce coup de maître, ira encore au-delà. Si certains, comme les Strokes, ont une formule, d'autres ont une âme et ne disent pas tout en un seul disque. Le meilleur est à venir. http://www.matadorrecords.com/interpol/