Lonely planet boy

Jobriath

par Emmanuel Durocher le 01/07/2005

Note: 7.0    

Si, dans une autre vie, Morrissey avait eu une quelconque charge au Vatican, il est facile de penser qu'il aurait exercé son ministère dans la béatification. En effet, après avoir sorti du placard les New York Dolls, le voici qui s'attelle à un fantôme : Jobriath.

La comparaison est facile, criante et se résume au seul nom de David Bowie, la ressemblance est parfois tellement énorme qu'on a l'impression d'écouter une compilation style "B-sides and rareties" de Ziggy Stardust qui forcerait un petit peu la voix. Que penser alors de ces quinze titres extraits des deux albums sortis entre 73 et 74, entre plagiat et génie mésestimé : pas facile de se faire une idée, le chroniqueur doute. Mais on peut encore voir des similitudes avec Elton John du côté du piano et parfois on s'éloigne du glitter avec par exemple le délire symphonique à la Vicente Minelli dans "A brief history of movie music".

Jobriath Boone débarque en pleine vague glam rock, le label Elektra signe un contrat pharaonique de 500 000 $ pour produire, sous la houlette de Jerry Brandt, les disques de ce jeune californien de vingt-quatre ans à grand renfort de musiciens expérimentés (Peter Frampton ou même … The Jobriath Symphonic Orchestra !!!) et de projets grandiloquents réalisés (une affiche de dix mètres sur douze à Time Square montrant la star à moitié nu) ou refusés (Show King Kong à l'opéra Garnier avec le chanteur perché sur un phallus de plus de deux mètres en guise d'Empire State Building). Cela n'a pas empêché un bide monumental tant public que critique.

A une époque où les autres stars naviguaient en eaux troubles et surfaient sur l'ambiguïté, Jobriath affiche son homosexualité dans des chansons où l'amour se conjugue exclusivement au masculin tout en alternant des titres à tonalité sentimentale comme "Heartbeat", "I'maman" ou "Street corner love" (sorte de "Waiting for my man" revisité) et parfois sado-maso dans "I love a good fight". Après l'échec de ses albums, il deviendra crooner de cabarets homos pour finalement disparaître emporté par le sida au début des années 80. Avec le recul, on ne peut que frémir à l'écoute de paroles comme "I have to cry to stay alive".