Jocelyne (Collection Twistin' the Rock vol 19)

Jocelyne

par Francois Branchon le 21/02/2002

Note: 9.0    
Morceaux qui Tuent
Oui j'ai peur
Exodus
Non plus comme avant


Novembre 1964, scène du cinéma Le Palace à Valence, première sortie nocturne d'adolescent et premier 'concert', la tournée de Richard Anthony qui passe par la Drôme. Après un lever de torchon quelconque (le Duane Eddy français Claude Ciari et sa guitare assommante), une petite bonne femme d'à peine quatorze ans s'avance intimidée sur les planches, se plante immobile devant le micro et chante. Elle n'a que trois chansons - je me souviens de "Exodus" - mais elle chante. CHANTE ! Jocelyne, est en vedette américaine du gala et il m'est impossible de quitter des yeux la gamine rondelette et joviale, impossible de ne pas être ému aux larmes et mis KO par cette présence et cette voix fantastique, étonnamment puissante, grave et lumineuse à la fois, ce coffre qui ne peut QUE faire penser à Brenda Lee ou à Edith Piaf, de manière bien plus évidente que le perroquet-potiche Mireille Matthieu que l'industrie du disque sur-vend alors - arnaque ! - comme héritière de la petite dame en noir. En novembre 1964, l'histoire ne faisait que commencer. Tout en restant au lycée, Jocelyne entame sa carrière, son premier Ep paraît en février de cette année-là. "Il a tout pour lui" est l'adaptation réussie de "Find find boy" de Phil Spector (pour Darlene Love) et "Non plus comme avant" est signé Mort Shuman et Doc Pomus. Jusqu'en 1966, Jocelyne publiera trois Ep par an, souvent enregistrés et arrangés à Londres, ponctués de nombreuses adaptations de Brenda Lee, qui devient son amie et l'invite dans les shows Tv américains, notamment le "Hullabaloo show" de la NBC en 1965, où elle partage la vedette avec les Zombies et Woody Allen. C'est (malheureusement pour elle) à ses débuts que ses chansons sont les meilleures, certaines même excellentes : "Le dimanche et le jeudi" ("Lonely lonely lonely me" de Brenda Lee), "J'ai changé de pays" ("Heart in hand" de Jackie DeShannon), "Les garçons" ("Bad boy" de Paul Anka), "La la la la" (de Stevie Wonder, dont la trame rythmique sera reprise par Nino Ferrer pour "Mirza"), "Oui j'ai peur" (fantastique cover de "Is it true" de Brenda Lee, arrangements de Jean Bouchéty), le poignant "Exodus" (le bateau d'immigrants juifs américains à la création d'Israel en 1948), "On prétend que j'ai pleuré". Jocelyne s'exilera en 1967 au Canada, pour revenir au début des années soixante-dix. Personne ne saura ce que la carrière de Jocelyne serait devenue, elle se tue en moto le 25 juin 1972, le jour de la sortie de son dernier single, écrit pour elle par Alain Bashung. Une réédition précieuse, longtemps attendue, tant les rares Ep originaux (rien à moins de 200 balles) accusaient la fatigue.