Raga marwa

Kushal Das

par Hugo Catherine le 15/12/2005

Note: 9.0    

Hypnotisant sans aucun doute. Envoûtant. Parfois, seulement quelques notes ponctuent notre écoute, telle une respiration ; dans cet appel à la méditation, nous percevons des bribes de mélodies et pourtant, toujours, la continuité mélodieuse. Les instruments charmeurs de Raga Marwa, surbahar (sitar basse) pour Kushal Das, tabla pour Biplab Bhattacharya, et tampura pour Sudipta Rémy, donnent à entendre une musique live en apparence continue, paradoxalement jamais chiche en montées en puissance, en accalmies vaporeuses.

Si le calme peut paraître persistant, l'endormissement doux, les ruptures périodiques s'insèrent naturellement. Ces dernières témoignent d'une énergie contenue et maîtrisée. Le déploiement des morceaux fait sens, éveillant notre propre approche sensorielle, lente et progressive. Ici, nul besoin de provoquer pour attirer l'attention. l'allure nous prend, nous emporte, nous suivons avec allant. Cet art de ne jamais laisser l'auditeur en chemin est d'autant plus remarquable qu'il s'agit là d'une musique d'ailleurs, pour nous parfois intellectuellement indéchiffrable. La performance est ainsi évidemment technique et admirablement sensorielle, jamais tape-à-l'œil.

Le quatrième morceau, Jhaptal - Gat, quatrième phase d'une musique qui s'emploie à prendre son temps, voit entrer le tabla ; d'abord discret puis laissant libre cours aux sonorités les plus basses, rondes et ballonnées, aux allures les plus vives. Démarre alors, jusqu'au bout de l'album, une poursuite extatique entre surbahar et tabla. Le tabla investit le champ de la virtuosité où se meut déjà le surbahar, tout en persistant dans une logique d'accompagnement. Ce duo, sous-tendu par le tampura, atteint un degré de musicalité où les simples jeux de questions/réponses laissent place à un entremêlement profond et permanent.

La finesse d'exécution apparaîtra aux plus néophytes. Sur la fin, la cadence se fait puissante, inébranlable. Les dernières accélérations sont tout bonnement bandantes. Un album profondément paisible et graduellement excitant : une transe ?