La Cave Saravah Vol 1 - Une compilation d’œuvres rares et inédites par Love Poulbot

La Cave Saravah

par Elhadi Bensalem le 04/10/2007

Note: 7.0    

Une compilation d’œuvres rares et inédites (1966-1980) par Love Poulbot.
Pour ses quarante ans, Saravah le label de Pierre Barouh nous offre cette compilation en forme de compensation pour toutes les références, parmi près de deux cents au total, qui n'ont pu être rééditées numériquement par la structure indépendante. Ici les morceaux les plus obscurs ou méconnus de l'histoire musicale de Saravah ont été débusqués d'une main de commissaire-priseur par The Love Poulbot, programmateur d'une radio locale nantaise et proche de la nébuleuse Barouh.

Le ton est donné dès l'entame du disque, le patriarche fondateur présente une soirée "scène ouverte" quelque part au milieu des années soixante-dix : "S’il y'en a parmi vous qui ont envie de chanter, ils peuvent toujours prendre une guitare et venir chanter ici, ils sont les bienvenus". Tout est dit, sans bride aucune et le hasard fera sûrement bien les choses.

S'en suit comme attendu une sorte de juke-box martien digne de la plus effrontée des radios pirates. La world-music, bien avant la lambada et l'exotisme à touriste, prenait ici ses lettres de noblesse, et permettait à des musiciens du monde entier de s'exprimer le plus librement du monde confrontant leur culture à celle d'autres musiciens. Ainsi, un titre de ce qu'on appellera alors le free-jazz par le Cohelmec Ensemble donne l'accolade à une loufoquerie tango d'Higelin se trouvant non loin d'une saillie électro-bruitiste nommée "Cyclothimie". Nous sommes conviés au cœur d'un bouillonnement expérimental d'hommes et d'idées. Ce qu'on peut nommer le "Saravah Park" d'alors, installé à Montmartre, où studios, bureaux, et bar à copains se trouvaient centralisés, fait partie de ces autosuffisances rarement constatées dans le monde de l'édition musicale, fantasme qui perdure jusqu'à aujourd'hui pour les quelques idéalistes, pas encore décimés par la néo-culture discographique du sacro-saint chiffre de vente minimum.

Ingénieurs du son, compositeurs attitrés, plumes précieuses ou gloires vocales du label ont chacun leur part du testament sonore. On apprend par ailleurs que Nicole Croisille a chanté un titre à la gloire du champion de ski français typiquement sixties, "Killy". Que Daniel Vallancien, le savant fou de Saravah - qui a offert sur un plateau le son démesurément dense et inédit du premier album de Brigitte Fontaine - s'offrait des récréations au sein du collectif Electronic Distorsions Of France (appréciez le détournement). Que le rock progressif de Catharsis dormait dans les mêmes tiroirs que les sucreries Bacharachiennes de Francis Lai.

"Il y a des années où l'on a envie de ne rien faire" nous signifie Saravah à l'arrière de chacun de ses disques, comme une marque de fabrique. Peut-on simplement dire qu'ils l'ont amplement mérité ?