| | | par Jérôme Florio le 12/04/2003
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| Dans "South Park, le film", les gentils kids américains se mettaient à jurer comme des charretiers à cause d'une série télé, et, horrifiés, les États-Unis déclaraient la guerre au Canada. Mais maintenant il est trop tard, l'ennemi agit de l'intérieur : le ver est dans la (grosse) pomme, tout nu et prêt à terroriser l'Amérique puritaine et hygiénique. Depuis six ans et trois disques, Les Sans-Culottes (LSC), autoproclamés "meilleur groupe de rock français en exil", perfectionnent à New York une solide réputation assise sur des
concerts hilarants, déjantés et qui rockent dur. Quelque part entre LSD et SLC ("Salut Les Copains), ce groupe à la biographie fantaisiste mixe joyeusement dans son shaker pop française "yé-yé" des années soixante et rock garage en un cocktail coloré et euphorisant. "J'suis snob, y'a rien à faire..." fredonnait Boris Vian : depuis Brooklyn, les LSC mettent un point d'honneur à chanter en français. Ils vivent en rêve sur la Rive Gauche, Olympe lointain dont ils s'imaginent descendre, beaux comme des dieux dans leurs tenues Michel Polnareff échappé de "Casanova 70" - avec des épingles à nourrice - et minijupes Saint-Laurent à motif Mondrian. Leurs chansons sont truffées de name-droppings de références sixties et de lieux parisiens (de Babar aux Buttes-Chaumont en passant par la chaude rue St-Denis) : une géographie apprise amoureusement sur des cartes. Dans leur frigidaire on trouvera plus sûrement de l'Orangina et de la Veuve-Cliquot que du Coca-Cola ; Les Sans-Culottes entendent donner aux yankees une petite leçon de savoir-vivre frenchy and chic ("Non merci Oncle Sam"). Une leçon apprise à l'"Ecole de merde" : de cette bombinette punk et gravement absurde à la sexy et ensoleillée "Sa Sabine", on en voit de toutes les couleurs. Ici pas besoin de Prozac : Balzac et Apollinaire se débauchent sur les rythmiques twist endiablées de Jean-Luc Retard et Harry Covert ; Jacques Dutronc, Nino Ferrer et les Strokes se télescopent au son d'un orgue Hammond priapique ("SOS éléphants"). Comme maître de cérémonie, le "Caruso du Massif Central" : j'ai nommé Clermont Ferrand (!), leader pataphysicien qui fait rocker la langue française comme rarement - Jean-Louis Murat peut retourner se pignoler dans les fougères. La délicieuse Céline Dijon (!!), en solo sur "Les sauvages", égrène ingénument des horreurs cannibales et érotiques, rejointe aux churs faussement angéliques par Kit Kat. Plutôt que sur le remix mou et trop propre de "Funky peripherique" qui sonne comme Imagination, c'est sur la grandiose "Le coq sportif" que devrait s'achever le disque : enregistré live à la très hip Knitting Factory de New York, Céline Dijon réussit le tour de force de faire crier "Cocorico" au public qui en redemande ! Grâce à leur énergie dévastatrice et leur humour, les LSC se jouent des clichés pour livrer moins une parodie qu'un pastiche sincère et éclatant. Furieusement dandys, drôles et "roquefort'n roll" : Les Sans-Culottes sont vraiment trop bath !
NB : visiter absolument leur site |
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