Fictionary

Lyle Mays

par Sophie Chambon le 26/01/2001

Note: 8.0    

Partie intégrante du Pat Metheny Group depuis sa rencontre avec le guitariste en 1975, Lyle Mays a rarement enregistré un album sous son nom et c'est donc un Fictionary publié en 1992 qu'il nous est donné d'écouter ici. Comment ne pas se réjouir de (re)découvrir cette petite merveille d'intelligence musicale et de sensibilité, un bagage de compositions originales et deux thèmes d'improvisation collectives ? Lyle Mays aurait pu choisir plus mal ses accompagnateurs: le bassiste Marc Johnson excelle à improviser les lignes de basses, dans la forme dialoguée du trio justement (il fit partie de la dernière formation de Bill Evans). Quant au batteur, il s'agit du royal Jack DeJohnette. Une vraie conversation s'installe avec De Johnette bien plus inventif que certaines fois avec Keith Jarrett ! DeJohnette peut jouer ce qu'il veut en fonction de ce qu'il entend, d'où un certain déchaînement sur les deux "trios" improvisés ! Il réunit force animale et subtilité mélodique ! Avec de tels complices, la musique ne pouvait être oubliée : au final, 55 minutes autour d'un piano qui développe des volutes enflammées, intenses. De la poésie en action. Un beau disque, à la jaquette "littérale" qui nous entraîne dans une spirale de rêves colorés : paysages, atmosphères changent à chaque plage. Car il s'agit bien de chapitres qui se déroulent sous nos yeux avec ses onze pages dédiées aux grands maîtres du clavier. Un hommage dès le titre premier, pour évoquer la figure tutélaire de Bill Evans, incarnation d'un impressionnisme un peu rêveur du début des années 70. On retrouve aussi les autres figures de ces années-là : Chick Corea, Herbie Hancock, Keith Jarrett ou encore le grand inspirateur Paul Bley. Un bataillon de musiciens qui jouent vraiment du piano (ce qui peut les distinguer de certains pianistes qui jouent de la musique). Lyle Mays a gravé depuis, en 2000, un album solo "Improvisations for expanded piano". Ce qui prouve bien qu'il a des choses à dire et qu'il peut sortir de l'univers un peu commercial (?) du Pat Metheny Group. Qu'il continue comme avec cet album à faire du jazz. Du jazz au vrai sens du terme, avec une recherche de l'improvisation qui ne sonne pas toujours comme telle et prend parfois la forme de petites pièces, sonates ou poèmes. Avec un ton juste qui révèle le compositeur plus encore que l'interprète !