Stay human

Michael Franti & Spearhead

par Alexandre Leroy le 16/10/2001

Note: 9.0    

En parcourant le livret, on est en proie à la méfiance, des photos de forêts, d'enfants, de manifestations anti-OMC... Michael Franti serait-il le genre d'artiste à se parer d'un humanisme de circonstance pour plaire à une jeunesse tentant de s'acheter une conscience à bon compte ? L'écoute du disque fait voler en éclats cette méfiance. Michael Franti n'a jamais renié son engagement, que se soit avec les Beatnigs ou plus tard avec son groupe de Hip-Hop : The Disposable Heroes Of Hiphoprisy au sein duquel il a su développer un rap subversif et faire passer un message puissant ("Televison, the drug of people"). L'expérience s'est poursuivie avec Spearhead, chemin plus posé mais en rien assagi. Subtile alliance entre soul, funk et hip-hop, "Stay human" est avant tout un pamphlet cinglant contre la peine de mort. A travers l'histoire (fictive ?) de Sister Fatima, activiste noire de 61 ans condamnée à mort pour avoir au cours d'une dispute (soi-disant) tué un couple de blancs. Franti expose l'horreur d'un drame, en premier lieu ignoré des médias de masse, raison de la structure originale de l'album, bâti comme une émission de radio fictive, au cours de laquelle interviennent des auditeurs, le gouverneur (interprété par l'acteur Woody Harrelson) et Sister Fatima elle-même. Au fil de l'émission, les morceaux s'enchaînent, occasion de découvrir une musique pleine d'émotion, qui parvient à réunir la revendication du hip-hop, la subtilité et l'humanisme de la soul et du r'n'b, qui retrouvent ici en passant leurs lettres de noblesse, dans la grande tradition de la conscience (Franti ne cache pas sa filiation aux monstres du genre, Marvin Gaye, Stevie Wonder, Curtis Mayfield...) quel plaisir ! Un album réussi, éclectique, éclairé, un véritable engagement dans une cause, sans démagogie. Au fait, combien de Sister Fatima croupissent encore dans les couloirs de la mort de l'oncle Sam ?