Buena Vista Social Club presents Omara Portuondo

Omara Portuondo

par Francois Branchon le 20/04/2000

Note: 8.0    
Morceaux qui Tuent
He perdido contigo
No me llores mas


Connue à Cuba sous le nom de "fiancée du feeling", Omara Portuondo, avec cinquante-cinq ans de carrière derrière elle et une carrière discographique cependant assez mince, a atteint le statut de chanteuse de musique latine la plus respectée. Avec une voix qui a clairement macéré dans un baril de rhum, elle est la Cesaria Evora cubaine, capable de faire fondre en larmes un gang de bûcherons incultes, avec ces histoires d'amour qui foirent et les cœurs qui s'épanchent sur de subtils boléros. Elle a commencé à chanter à l'hôtel Tropicana en 1945 (et elle en est toujours une attraction, même si aujourd'hui c'est plus pour sa voix que pour ses jambes). Au sein des Loquibambla Swing (avec sa sœur Haydee), elle forme en 1952 Las D'Aida, chantant des standards internationaux pour les touristes américains, mais de vrais morceaux cubains lors des tournées aux Usa. A cette époque seulement, elle enregistre son premier album solo ("Magia negra" - RCA). Après la Révolution, fidèle à Castro, elle revient à Cuba et participe à l'aventure, chantant dans les champs pour encourager les fermiers à des records de moisson. Un deuxième album paraît, "Esta es Omara Portuondo", juste après son apparition dans le Sopot Festival (l'équivalent du concours de l'Eurovision pour les pays communistes). Elle passe la plus grande partie des années soixante-dix comme chanteuse de l'Orquesta Aragon. Un concours de circonstances a voulu que Omara Portuondo soit aux studios Egrem de La Havane en même temps que Ry Cooder et son Buena Vista Social Club et enregistre avec eux "Veinte anos", une chanson d'enfance, chantée par ses parents soixante ans auparavant. Dans la foulée, elle participe à la tournée filmée par Wim Wenders, à l'album solo de Ibrahim Ferrer... Alors cet album ? On pourrait en vouloir au label World Circuit de vivre sur le passé et de ressortir annuellement, comme un métronome, une vieille gloire. Mais qu'importe si la musique est toujours aussi bonne que celle-ci. Omara Portuondo se concentre là sur ce qu'apparemment elle sait le mieux faire : chanter avec passion et sentiment. Cela lui permet au passage de révéler la facette la plus triste de la musique cubaine, aspect plutôt occulté par tous les "garçons" qui l'ont précédée (sur les platines). Les arrangements de Demetrio Muniz (une vieille connaissance du Tropicana) sont parfaits de volupté et de beauté, avec un son restituant l'intimité. Un album qui s'annonce comme le disque ultime des samedi soir solitaires...