Baron von Tollbooth and the chrome nun

Paul Kantner, Grace Slick, David Freiberg

par Francois Branchon le 18/03/2020

Note: 7.5    

1973 : le Jefferson Airplane est officiellement décédé depuis quelques mois après un dernier album contractuel ("Live at Winterland - Grunt 1972), mais la scission interne durait depuis deux ans, avec Hot Tuna de Jorma Kaukonen et Jack Casady d'un côté et les projets de Paul Kantner et Grace Slick de l'autre. Ces derniers prirent la forme d'albums au casting incertain (tous les potes de la Baie y défilaient), avant que, dans les années quatre-vingt, conscient du potentiel commercial de la chose, Kantner fasse de Jefferson Starship (puis Starship tout court)  une marque qui va rapporter un max en produisant de la musique de stade.

En 1973, "Baron von Tollbooth and the chrome nun" est la troisième publication du couple Kantner/Slick après "Blows against the empire" (Grunt - 1971) et "Sunfighter" (Grunt - 1972), ici rejoint à la basse par David Freiberg, ex-chanteur de Quicksilver Messenger Service. Paul Kantner, tout farfelu et sympathique qu'il fut, était au début de l'Airplane un compositeur sachant être aérien ("Martha", "Today"...) qui s'est ensuite régulièrement enfoncé dans la lourdeur rythmique ("When the Earth moves again", "Rock and roll island" ou "War movie" aux semelles de plomb sur l'album "Bark" de 71). Ce qui était vrai au sein de l'Airplane l'est encore plus quand il prend les commandes d'une formation.

Ce qui sauve finalement ces trois Kantner/Slick c'est l'esprit de famille des musiciens de San Francisco. Dans chacun des trois, mais comme aussi sur le premier solo de David Crosby ("If i could only remember my name" 1971), ceux de Bob Weir ("Ace" 72), Mickey Hart ("Rolling thunder" 72) ou de Grace Slick ("Manhole" 73), tout le monde est là, les potes de l'Airplane/Hot Tuna (Jorma Kaukonen, John Barbata, Papa John Creach), de Grateful Dead (Jerry Garcia, Mickey Hart, Robert Hunter), de Steelwind (Jack Traylor, Craig Chaquico), de Crosby, Stills & Nash (David Crosby, Chris Etheridge)... Toute cette bienveillante compagnie apporte un esprit familier et une musicalité hors-pair, tant dans les vocaux que dans la musique : Garcia tient la lead guitare tout au long du disque, Craig Chaquico, jeune (19 ans) guitariste de Jack Traylor dans Steelwind, qui avait fait une apparition dans "Sunfighter" a ici une place prépondérante et contribue de manière majeure au son général.

Kantner et Slick ont à eux deux composé la quasi totalité des morceaux, seuls ou ensemble, à l'exception de "Flowers of the night", écrit et composé par Jack Traylor. Celui-ci qui a nos faveurs, avec son texte s'aventurant de manière inattendue très très loin de la Baie de Frisco, où il est question de Révolution française, de Robespierre, de Bastille qui brûle et d'un certain "Louis!" qu'on harangue. Craig Chaquico y apporte une fraicheur, une constance de climats, un art des arabesques et un son unique, notamment sur son solo final. L'anecdote raconte que Garcia, qui passait au studio poser ses solos une fois les rythmiques et les voix mises en boite ait refusé d'effacer celui joué innocemment par Chaquico pendant les prises et choisi de le garder, car "le gamin le méritait bien".





PAUL KANTNER GRACE SLICK DAVID FREIBERG Flowers of the night (Audio seul 1973)


Le solo de Chaquico est à 2:55


nb : Craig Chaquico est toujours actif de nos jours, producteur-guitariste de new age (nul n'est à l'abri d'un naufrage).