Qu'est-ce que c'est beau

Ramon Pipin Band

par Cédric Antoine le 05/05/2019

Note: 8.5    

Lettre à Ramon.

Qu'est-ce que c'est beau un ancien qui se souvient de ses belles années. Sont-elles d'ailleurs passées ?

Mais non Ramon, tu n'es pas une anecdote, tu vis et encore très bien ! Permet que l'on te tutoie car tu es un peu tous les mélomanes de années post-rock de 1968 à nos jours. Tu es nous tous, qui cherchons encore le sens de la vie, de l'art et surtout de la musique pop. En effet nous nous demandons tous aujourd'hui où ces auteurs, compositeurs interprètes, que tu cites à l'envi, on pu disparaître en moins de quinze ans au profit de la volonté farouche de faire du blé.

Et Dieu que c'est bon de retrouver des textes sans filtres, venus directement d'une époque où l'on pouvait encore tout dire sans se prendre une dizaine d'associations effarouchées sur le râble. L'amitié franco-albanaise va d'ailleurs en prendre un coup. Nous pourrions égrainer ad libitum les tirades au second degré de tes chansons, mais il vaut mieux écouter ton album pour éviter de les sortir du contexte.

Heureusement que des gens comme toi, nous rappellent que Marcel Gotlieb, Pierre Desproges, Goscinny et Au Bonheur Des Dames sont encore vivants dans un cercle malheureusement devenu fermé allant de la gauche appelée jadis caviar à la droite centriste. Tous ces gens modérés nés entre 1960 et 1985 qui n'avaient aucune haine pour les autres et qui se foutaient plus ou moins de tout tant qu'on leur fichait la paix. Cette période révolue ou l'on pouvait voter à droite par héritage culturel et malgré tout écouter Higelin et adorer Coluche sans être jugé. Une époque ou la tolérance sans être dictée par les bien-pensants était finalement assez naturelle.

Ton album est définitivement ce que l'on appellera un hymne à la nostalgie. Et n'en déplaise à la caste citée précédemment la nostalgie n'est pas du passéisme. Et se souvenir des belles années n'est pas de l'anti-progressisme. On peut objectivement dire que l'on vit une époque de merde et finalement se réjouir que certains n'aient pas peur de le dire et de le chanter avec ironie. Ce déferlement de haine sur les réseaux sociaux que tu dénonces, planqué sous des pseudos, est tout sauf un progrès. Qu'on se le dise.