| | | par Jérôme Florio le 15/03/2005
| Morceaux qui Tuent The kind Wedding bells are breaking this old gang of mine My good deed St Mary's walk
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| Quand on entend chanter Jonathan Meiburg, on se dit qu'il ne ferait pas de mal à une mouche quoi de plus naturel de la part d'un étudiant en ornithologie d'Austin (Texas), un passionné des oiseaux, qui mène en parallèle une vie de musicien : aux claviers dans Okkervil River, et leader du groupe Shearwater (formé en 2000, deux disques au compteur). A ses côtés dans Shearwater, on retrouve Will Sheff, la tête pensante d'Okkervil River (ici au second plan et qui contribue à l'écriture de cinq titres), Thor Harris à la batterie et au vibraphone (le chevelu du groupe, normal puisqu'il a un nom de Viking et qu'il accompagne Devendra Banhart), et Kim Burke à la guitare basse. Ensemble, ils élèvent les chansons amoureusement couvées de "Winged life" à des hauteurs qui font leur écoute à chaque fois plus poignante.
Jonathan Meiburg écrit des folk-songs à la démarche lègère, presque translucides, qu'il chante d'une voix à la fois tremblée et secrètement sûre d'elle. Certaines ont l'immédiateté qui séduira les amateurs de Belle & Sebastian (l'accrocheuse ritournelle "My good deed"), mais souvent, c'est aux épures d'un Mark Hollis que l'on pense, à ce folk impressionniste qui crée la lumière par petites touches : la fin en lambeaux de violons de la tendue et rentrée "Whipping boy", les silences qui amènent du contraste. Partout, il faut souligner la délicatesse et la variété des moyens employés pour s'arracher à la gravité (la batterie de Harris qui rend plus dense la caresse préliminaire "A hush") : pedal-steel ("The kind"), piano ("The world in 1984"), banjo ("Whipping boy")... L'orgue Hammond et le vibraphone habillent "Wedding bells are breaking this old gang of mine" comme une jolie fille se prépare pour se rendre à un bal désert, qui se fait belle alors que personne ne l'a invitée à sortir. La voix de Meiburg, comme celle de l'ex-Talk Talk, déploie des trésors de ferveur recueillie, et rien ne prépare au climax atteint sur "St Mary's walk" : un envol d'autant plus bouleversant qu'il aura été préparé par une longue et belle course d'élan. Sur la fin du disque, ample et aérée, on gonfle à bloc ses poumons d'un air pur et rare, que l'on ne goûte qu'en tutoyant les nuages.
Cette collection de 12 chansons n'est que la partie émergée d'une grosse portée de 22 : en attendant la suite (5 titres ont déjà fait surface sur le récent EP "Thieves"), on écoutera "Winged life" précieusement, comme on fait attention aux ailes fragiles d'un papillon mais dont le battement peut déployer à l'autre bout du monde assez de force pour ébranler des montagnes. |
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