Slo-Mo

Slo-Mo

par Jérôme Florio le 20/01/2004

Note: 7.0    

"Death of a raver", l'ouverture du premier album de Slo-Mo, en résume tout le propos. Un clin d'œil long de seize ans sépare "Death of a disco dancer" des Smiths du groupe de David Gledhill : il dresse l'acte de décès de la génération techno de la fin des années 80, avec l'air du survivant qui se promène parmi les ruines encore fumantes.

Gledhill confesse une admiration autant pour les Smiths que pour le metal et le hard-rock, scène avec laquelle il a frayé dans les années 90 - loin des dance-floors. Slo-Mo est à la fois plombé par des grosses guitares et dépositaire de cet accent traînant et crâneur du nord de l'Angleterre : un baggy-sound électronique et électrique à la fois, mais sans les fourmis aux jambes, lourdes et ankylosées.

Les chansons sont construites autour d'une seule idée qui dure quatre minutes, par exemple le recours à des samples décalés (Astrud Gilberto sur "Death of a raver", Joao Gilberto sur "Girl from Alaska"). L'ensemble est un peu bancal et vite limité dans ses effets, mais sourdement agréable et lancinant ("Lost stones", "Car accident Joe") : Dave Gledhill nous plonge dans le cerveau embrumé des fêtards qui ont vieilli et glissé dans le triste état de junkie sans s'en apercevoir. UnHappy Mondays... Ils sont devenus spectateurs de leur vie, qui passe au ralenti, image et son déformés. Et quand il leur faut leur dose, ça vire à la série B pathétique ("Boy from the city") – des No Fun Lovin' Criminals, qui font pipi de trouille dans leur culotte.

La voix et les textes sont mis en avant de manière peu habituelle pour un groupe de ce genre : avec cynisme et ironie, Gledhill sait échafauder des petits scénarios croquignolets, parfois macabres ("Short stories"), en usant de l'autodépréciation ("Love hate devotion" dans laquelle le narrateur se fait martyriser par sa nana) – un ton qui peut en effet rappeler Morrissey. Le thème de l'addiction sous toutes ses formes court tout le long du disque : la drogue, l'amour, dont on a une vision déformée sur le dub mou et répétitif de "Goldfish and alligator".

Confortablement installé au volant de sa voiture, le pied collé au plancher, Dave Gledhill semble envisager le crash final avec fatalité pour ses semblables : "Tell them I had a good time" pourrait leur servir d'épitaphe.