Inoxydable

Starshooter

par Francois Branchon le 31/08/2005

Note: 8.0    

1976-77 : bordel fracassant en Angleterre oblige, la France du rock bourgeonne, se cherche ses groupes pour elle aussi décaper le paysage musical local des restes de Ange et Triangle et remonte sur scène. Côté branchitude parisienne, sans répercussion populaire, Metal Urbain, Lou's, Asphalt Jungle, Stinky Toys d'Elli Medeiros et Jacno (qu'on retrouvera à la révolution suivante des jeunes gens modernes). Côté ouvert, Higelin jusque là ignoré par sa maisons de disques acquiert son aura, Bijou, ex-Pura Vida, se voit bien en Jam (même si Vincent Palmer n'a de Paul Weller que les chaussures), Téléphone, en retard de deux révolutions, ne sait que singer les Rolling Stones (les mômes de 12 ans s'en contenteront), et c'est à Lyon que pointent des têtes intéressantes. Electric Callas (musique prometteuse, pose élaborée, mais un Jangil Callas trop velléitaire pour assurer une quelconque pérennité à son groupe, dommage) et Star shooter.

Un nom à la héros de Bd, des fringues en vinyle rose et un chanteur - Kent Cockenstock - monté en Duracell. Musicalement au point, avec des textes malins et joyeusement iconoclastes (EMI France cachera à sa maison mère anglaise "Get baque", la reprise irrévérencieuse des Beatles, qu'elle supprima même du premier album), Starshoot était un cran au-dessus. Les concerts drainaient les Français rock, pas seulement punk, accueillaient en première partie les enragés locaux et se terminaient parfois très mal (combien de mecs en sang à la Patinoire de Grenoble en avril 78 après la première partie Elektrik Garbage ?), une plongée dans la réalité que ne faisaient qu'effleurer les intello-punk parisiens, au hasard Asphalt Jungle de l'inénarrable poseur Eudeline. L'atout maître de Star shooter fut au contraire de ne jamais se prendre au sérieux, son chanteur Kent - par ailleurs bon auteur de bandes dessinées et plus mélomane que "mélopunk" - sachant se mettre à distance.

Trois albums au compteur et puis s'en vont. La dignité, l'honnêteté et le refus de toute compromission imposèrent à Star shooter de s'arrêter en 1982. Une dignité toujours d'actualité, la carrière solo de Kent ne souffrant aucune remarque, n'ayant encore jamais été à ce jour signalé dans les émissions à play-back de TF1.

Cette double compilation regorge de bonnes choses, l'essentiel des trois albums - "Quelle crise baby", "Betsy party", "Ma vie c'est du cinéma", "Machine à laver", l'anti-coke et excellent "Méfie-toi des avions", "Papillon de nuit"... - et les raretés nécessaires, le fameux "Get baque", des versions live inédites ("Sale coup" et "La nouvelle vague" de 1980), celle de "'35 tonnes" de la compilation "Rock d'ici à l'Olympia" et la fameuse "Hygiène", version française du "Sweet Jane" du Velvet sous le nom des Scooters pour la compilation Skydog Commando de Marc Zermati en 1978.

... 3, 4 : Betsy, yé yé yé !! Party, yé yé yé !!