Teddy Thompson

Teddy Thompson

par Francois Branchon le 20/02/2001

Note: 9.0    
Morceaux qui Tuent
All we said
A step behind


Le génie n'est pas forcément héréditaire. Il arrive même assez souvent que le gène du talent se perde en descendant l'escalier (Julien Lennon, Ziggy Marley...). Certains, clones-perroquets aussi nuls (Ophélie Winter, David Hallyday) ou aussi géniaux (Jeff Buckley, Chris Stills) que leurs géniteurs, vérifient l'adage que les chiens ne se reproduisent pas en chats. D'autres enfin, génies à leur tour, s'épanouissent seuls, sans référence. Il y eut Rufus Wainwright, voici Teddy Thomson, dont le papa Richard Thomson, fondateur de Fairport Convention en 1968, est à la fois un des plus grands songwriters britanniques et un des plus fins guitaristes (anthologie Capitol à venir le mois prochain). L'atout principal de Teddy est donc de ne jamais sonner comme son illustre père. Sa voix est plus douce, son inspiration plus américaine, ses chansons plus romantiques et s'il fallait chercher une comparaison, c'est du côté d'un Neil Finn qu'on irait fouiner. Sa voix domine de bout en bout l'album, et l'enveloppe d'une monotonie lumineuse. Les musiciens qui brodent le décor et l’atmosphère de ces chansons le font avec finesse et maestria (la production, dominée par les guitares, est confiée à Joe Henry) et Richard Thomson apporte sa touche sur cinq d'entre eux. En particulier sur ce fabuleux et imperturbable "All we said", déchiré d'un solo tombé d'on ne sait où, éraillé, à moitié faux, écorché vif comme ceux que balançait Neil Young à ses débuts, une stridente douceur en plus (son secret !). Une mention spéciale à "A step behind", balançoire au ralenti, ballade aérienne à la voix bien terrienne, aux entrelacs majeurs de guitares, dont les notes tournoient et glissent comme une steel (Jon Brion et Chris Bruce) et le solo éclôt à la surface, volée de bulles venues du fond de l'eau, sans bruit malgré la distorsion. Ou encore "Missing child", ballade feutrée nappée d'harmonium. Deux petites réserves, "Thanks a lot" et son attaque vaguement puérile contre les journalistes qui osent critiquer, et la reprise (morceau caché) de "I wonder if i care as much" des Everly Brothers, que la voix plombe de nostalgie, quand celle des deux frangins l'emmenait dans les étoiles. Il y a de la graine de génie chez Teddy Thomson, l'ébauche déjà sidérante de son monde à lui, aux racines anglaises vraiment bien lointaines, dont les solos de son père sont les seules réminiscences.