Threads

The David S. Ware String Ensemble

par Sophie Chambon le 19/01/2004

Note: 8.0    

David S. Ware est un musicien rare qui entretient la flamme du free jazz dans la plus pure tradition de la "great black music". Il dit, et on veut bien le croire, qu'il ne joue qu'une seule musique, celle qui lui permet d'explorer son intériorité. Et il est vrai que, quand il empoigne son saxophone, le volumineux ténor zèbre l'espace de biffures lumineuses, énergiques et souvent rageuses. Mais il a infléchi une nouvelle direction à son parcours musical, avec cet album cousu sur mesure pour une nouvelle formation : au David S. Ware Quartet désormais incontournable (Guillermo E. Brown, Matthew Shipp au Synthé Korg et William Parker) se joignent Mat Maneri altiste minimaliste, lunaire, doux autant que discret et le violoniste classique Daniel Bernard Roumain.

Si on vivait le retour à l'Afrique ancestrale dans sa version de la "Freedom suite" de Sonny Rollins, David S. Ware, dans cet album, justement intitulé "Threads", tisse patiemment les sons, tressant une chaîne de compositions qui font la part belle aux cordes, dans un programme conçu avec son complice Matthew Shipp, co-producteur de l'album, pour le jeune label très prometteur Thirsty Ear.

Aussi, bien qu'il s'efface sur la moitié des titres, il n'en demeure pas moins le maître d'oeuvre de l'ensemble, attachant pour ses qualités d'improvisateur, très à l'aise dans l'exercice de compositions "ouvertes" comme l'envoûtant "Ananda rotation" qui ouvre l'album, ou la tournerie qui suit, orientalisante à souhait "Sufic passages". Les cordes magnifiées sur le titre "Threads", à la beauté épurée et fragile ou sur "Carrousel of lightness" disparaissent sur un thème récurrent "Weaves", pour laisser place à un duo rythmé afro-cubain de saxophone-batterie. Une suite très éclectique de pièces s'échappe de cet écheveau tramé avec soin.