Little lost soul

The Third Eye Foundation

par Guillaume Cordier le 15/02/2000

Note: 8.0    

Frénésie rythmique, chœurs d'opéra et basse telle une balance, un point d'équilibre entre ces deux voies musicales, si disparates, si éloignées dans le temps et dans le ton. De cette fusion étrange naissent des instants alchimiques de pure beauté, des résonances aberrantes, une mise en écho encore inconnue. La musique de The Third Eye Foundation est organique et monstrueuse, elle peut dégorger la plus grande violence ou insinuer un romantisme forcené. Elle se frotte aux corps, et transpire et marche lourdement, avec insistance, parfois au bord de la chute, au bord de la cassure rythmique, et puis se remet d'aplomb, et de nouveau avance comme un enfant têtu. Elle peut, au contraire, étendre ses ailes, comme en plein rêve, et voguer avec langueur, dans un théâtre imaginaire, fait de sensations atténuées, de violons et de visions lugubres. Avec, en arrière plan, ce désir irrésistible de ne pas tomber dans le silence, alors qu'on s'en approche d'autant plus, à force de saturation des sons, à cause justement de cet engorgement, de ce trop-plein qui vient finir certaines chansons ("Half a tiger" et "Lost"), saturation donc qui ne laisse pas de répit, et qui se mue parfois en un chant d'outre-tombe. Atmosphère sinistre, tour à tour lascive et martelante, lunatique, s'appropriant la déconstruction des rythmes du breakbeat, pour la coller aux chants incantatoires, pour lacérer les voix béantes. Musique de l'envahissement, de la corruption, du collage absurde et poétique. On reste ébahi devant un disque aussi symphonique et hypnotique.