Ego:Echo

Ulan Bator

par Frédéric Joussemet le 22/05/2000

Note: 9.0    
Morceaux qui Tuent
Let go Ego


L'accélération lascive d'un magnéto rebranché attire l'attention. Seul le ronflement d'un orgue Hammond en attente tient en éveil une oreille étrangement engourdie, attirée par quelques bruits. Miniatures et acoustiques, ils deviennent crissements électroniques, toujours en sommeil. Le cerveau suit encore un peu plus, presque groggy. Un peu plus... l'envoûtement arrive. La basse n'est pas loin, mouvante à moins que nous ne tanguions sous la houle du Hammond devenu intermittent. La batterie, orchestre de percussions minimalistes, n'est pas un repère. C'est un leurre déplaçant sans cesse l'équilibre sans le rompre, car rien ne peut se fixer, tout coule au flot des chœurs psalmodiés dans la brume, perdus bientôt dans des arpèges de guitares. Tout flotte à sa place, libre et léger jusque dans la tension qui monte, horizontalement. Sans prévenir la hargne explose enfin, car c'est inéluctable : tant de violence murmurée ne peut rester contrôlée sans fin, le titre l'indique bien, Let go Ego !. La musique d'Ulan Bator est tout sauf calme, comme une chaise électrique elle parait immobile et sereine mais il n'en est rien. La friction entre refoulements et explosions surgit sans cesse, même dans les chansons plus rock et rythmées. Quoiqu'il arrive ils avancent, tordent leurs cerveaux et instruments pour faire perler leurs sentiments cachés et livrent ce breuvage à ceux qui le veulent. Et la mixture est belle tant le trio est aussi musicalement inspiré qu'humainement torturé. Un peu de pop (sombre) pour les voix et de trip hop pour le rythme, il y a des bases reconnaissables. Seulement elles ne sont là que pour maintenir l'édifice, un peu comme si Pink Floyd s'inspirait de Portishead (et non l'inverse). Sans cesse le travail de la texture sonore s'opère dans l'ombre, derrières les instruments de premier plan. La musique qui en sort est tout simplement profonde... et belle.