The ballad of Den the men

Wise in Time

par Emmanuel Durocher le 30/10/2006

Note: 8.0    
Morceaux qui Tuent
The ballad of Den the men
Backfire band


Ian Simmonds alias Wise in Time n'est pas un total inconnu, depuis quinze ans il traîne sa bosse dans le landerneau électronique. Dès le début des années 90, il fait partie d'un projet acid jazz The Sandals (avec en particulier la paire Barnes et Daley plus connus sous le nom de Leftfield qui commettront un album étalon avec le pas gauche du tout "Leftism"). A partir du milieu de la décennie, Simmonds se lance en solo avec Juryman (chez Crammed) ou sous son propre nom (chez Studio K7), compose des musiques très en vogue (trip-hop, downtempo, dub, nu-jazz), remixe et mixe.

Un peu comme Death in Vegas l'avait fait pour le rock et la techno sur "The Contino sessions", ce nouveau projet mélange beaucoup de jazz et un peu de folk avec diverses tendances de la musique électronique en appliquant ses rythmes et règles avec de véritables instruments : guitare, piano électrique, saxo, basse… on n'y trouve pas l'ombre d'ordinateurs ou de samplers, seuls quelques scratches qui s'échappent par moments ou une boîte à rythmes vient rappeler d'où Simmonds vient. Mais il n'y a pas que son monde musical que l'anglais abandonne partiellement puisqu'il est parti à Iena en Allemagne enregistrer les treize morceaux avec des étudiants en jazz de Dresde, on est cependant loin des Dresden Dolls mais très proche de l'univers de Morphine, groupe du regretté Mark Sandman qui avait réussi à réconcilier popeux et rockers avec le jazz dans les années 90. Les ambiances créées par le groupe sont souvent hypnotiques sans être soporifiques, "Backfire band" reprend les rythmes saccadés et à contretemps de la jungle en les tempérant, la jungle (la vraie, la forêt !) on la retrouve dans "Back from somehow" avec ses cordes répétitives accompagnées de nombreux sons inquiétants et animaliers qui évoquent les ambiances narcotiques du Future Sound of London, "Jah walker" ressemble à une partie de ping-pong entre la musique cubaine et le dub jamaïcain, la lascivité de "The ballad of Den the men" charme grâce à des sursauts de cuivre et ses lignes de basse rondes venues directement de chez Melody Nelson sans oublier les clins d'œil à Miles Davis ou John Coltrane sur "The well" ; les morceaux prennent des directions très différentes et même si certains paraissent avoir un aspect un peu trop "agréable à l'oreille", on ne pourra pas leur reprocher la facilité.

Mais passé l'aspect assez original et novateur de la musique, le plus important à retenir dans "The ballad of Den the men" est peut-être la voix de Simmonds, pénétrante, envoûtante et organique, tout en retenue au fil de l'album ; elle se révèle dans les chansons qui se rapprochent davantage du folk comme "Crazy chair" ou "Nine", ces morceaux en font un digne héritier de Nick Drake ou un cousin éloigné de Piers Faccini et Mark Kozelek. Ian Simmonds est un grand chanteur de folk, c'est même dommage qu'il y ait tant d'instrumentaux sur l'album. On est donc loin des compilations électro-jazz surfaites, lisses et monotones, à chacun de pénétrer à son rythme dans l'univers inédit et poétique d'un "électro libre".