Beatriz Ferreyra

Beatriz Ferreyra

par Hugo Catherine le 29/07/2013

Note: 7.0    

"Dans un point infini", c'est d'abord un infini de violons - lorsqu'un infini s'éteint, un autre s'éveille. Le disque s'ouvre par une longue introduction infinitésimale avant qu'un jet de cordes ne prenne le dessus sur les autres et trace un fil narratif. Cette pièce est avant tout un flux continu d'enchevêtrements, se muant parfois en éboulements voire en évanouissements. Beatriz Ferreyra propose une vision maximaliste de l'instrument, emplissant l'espace, tout en longueur, tout en profondeur. La musique semble ainsi poursuivre sans cesse une ligne de fuite. Si plusieurs tableaux se succèdent comme autant de détours, la quête d'une perspective filante prédomine.  

Puis, c'est en effet "L'autre rive". Cymbales et voix introduisent une puissance sonore acousmatique, où des bruits fuyants dévorent tout sur leur passage. L'heure est plus grave, le temps se gâte. La surimpression des percussions, aux accents tribaux, forme un roulement de tambours continu. "L'autre rive" est une expérience de "percoustique" intimidante, une belle illustration de la "musique des sons" défendue par le Groupe de Recherche Musicale de l'INA.  

"Les larmes de l'inconnu" constitue également une belle expérience électroacoustique où se mêlent énergie et mystère. Elle prend cette fois-ci la forme d'une escale dense et méditative.  

Enfin, "Un fil invisible" s'ouvre par un beat-boom unique, digne d'un acharnement hard techno : simple éveil avant de suivre un fil électroacoustique peut-être invisible mais bien audible. Les sons acoustiques sont ici vécus comme des sursauts de matière pure. A l'oreille, "Un fil invisible" est souvent délicieux. La compositrice joue avec les sons proches et lointains, acoustiques et électroniques, pour mieux fixer notre attention auditive.  

L'art artisanal de Beatriz Ferreyra ne se donnera pas facilement à toutes les oreilles, trop nourries d'écoutes plus cadrées. Beaucoup passeront leur tour. Il suffit pourtant de les ouvrir en grand pour goûter des sons souvent bien délicieux.