L'homme qui pleut...

Bonzom

par Francois Branchon le 29/01/2002

Note: 8.0    
Morceaux qui Tuent
Victor Noir
La visite


Bonzom est un personnage, un vrai. Une immense silhouette maigre, presque décharnée, un crieur solitaire de deux mètres au long manteau pourpre, impressionnant lorsqu'il tend les bras vers le ciel, un crieur de Munch à coeur d'artichaut, possédé et trahi par ses trésors de tendresse.

Accompagné d'un percussionniste, un saxophoniste (soprano ou baryton), un violoniste aux doigts de gazelle (l'excellent Olivier Morel) et un contrebassiste, tous cornaqué par le (très rythmique aussi) pianiste (aveugle) Mickaël Guillaume, Bonzom n'échappe pas - sur scène - à la comparaison avec Brel : même variété d'atmosphères, même sens scénique, même "vie" de la chanson, toute entière pétrie à l'intérieur et explosée par toutes les pores.

Sur disque, l'ambiance est différente, le studio semblant brider le souffle de la scène, peinant un peu à retrouver sa hauteur parfois vertigineuse. Mais Bonzom y gagne en revanche sur l'engagement "politique" des textes (au sens humaniste), un engagement avec parti-pris poétique, pari de la barre placée très haut, mais risqué car faut pas se louper. Objectif atteint, les textes sont de savoureux seconds degrés ("Les coqs de comptoir"), intimistes ("La visite" et son arrangement fondant de maison de poupée), humoristiques ("Dans la rue des Martyrs"), décalés et sarcastiques ("Réveil" qui fait très justement rimer 'chasse d'eau' avec 'Jean-Pierre Foucault'), autobiographiques ("L'ampleur du Zeppelin"), graves ("Algérie"), d'humour 'noir' (succulent "Victor Noir")...

Bonzom revendique un héritage de nanti, Yves Montand, Gribouille, Maurice Fanon, Jacques Debronckart, Yvette Guilbert... (ce serait intéressant de l'entendre reprendre par exemple "Casa d'Irene" de Pia Colombo). C'est à l'évidence un futur (très) grand.