Karen Dalton - Jeunesse d'une femme libre, de Greenwich Village à Woodstock

Cédric Rassat et Ana Rousse

par Francois Branchon le 19/10/2017

Note: 8.0    

Rares sont les documents, informations, témoignages sur la nouvelle vague du folk américain qui émergea à Greenwich Village vers 1960/61, une jeune armée de combattants purs et durs, idéalistes, biberonnés à Woody Guthrie et Pete Seeger, et dont les chansons valaient actes d'engagement. Il n'était pas question pour eux d'en faire un commerce, et encore moins de chercher à plaire. Leurs lieux d'expression étaient quelques cafés du district, le Bitter End, la White Horse Tavern et le célèbre Café Wha?.
Bien sûr, si certains - rares - virent les minuscules scènes de ces cafés comme un marchepied pour se faire connaître et monter beaucoup plus haut, Bob Dylan en tête, la plupart les considéraient comme un stade ultime de l'expression, et l'idée d'enregistrer un disque aurait été saugrenue. Pas question de tomber dans le piège commercial des maisons de disques qui leur tournait autour.
Après quelque temps, Tim Buckley signé par Elektra partira en Californie, Tim Hardin se retrouvera chez CBS, Richie Havens chez RCA, Fred Neil chez Capitol... mais certains restaient inflexibles, Phil Ochs et surtout Karen Dalton.

On a déjà parlé de son premier album dans ce magazine et dit tout le bien bouleversant qu'on en pensait. Cette biographie en BD vient apporter quelques éléments de compréhension et d'information sur la vie de cette femme dont Fred Neil disait "she sure can sing the blues out of the shit".
Intransigeante, intègre, n'osant prétendre à une quelconque autorité qu'engendre le succès, s'estimant indigne d'être adulée, refusant l'argent, Karen Dalton parait dans une recherche perpétuelle de liberté, en fuite constante, pour finalement s'avouer vaincue. Et en 1969, pressée par ses amis les plus chers, dont le producteur Nick Venet, elle acceptait d'enregistrer son album "It's so hard to tell who's going to love you the best".

Comme dit en préambule, les documents sur cette scène effervescente sont plutôt rares, y compris sur le net : un magnifique article sur Fred Neil dans un Mojo de 2005, "Inside Llewyn Davis" le biopic (non officiel) des frères Coen sur Dave van Ronk. La BD de Rassat et Rousse vient combler un vide. Elle est cependant un peu monotone, très (trop) linéaire, fait intervenir de nombreux musiciens sans les citer, devenant une BD à clés un rien frustrante. Mais très bien idocumentée (grâce notamment à Peter Walker), elle sera indispensable aux inconditionnels de Karen Dalton. Les autres en revanche risquent de s'emmerder un peu.



KAREN DALTON It hurts me too (TV 1969)



Ci-dessous, un extrait du documentaire de Roviros
Manthoulis (le réalisateur de "Le blues entre les dents" en 1973) pour la télévision française en 1970, dans lequel Karen Dalton est filmée chez elle dans le Colorado :

KAREN DALTON Blues jumped the rabbit (TV française 1970)