Recueil de l'Ermitage du Prunus

Chen Leiji

par Hugo Catherine le 16/12/2005

Note: 5.0    

Pour considérer "Recueil de l'Ermitage du Prunus", arrêtons-nous un instant sur l'histoire du qin, instrument chinois ici à l'honneur. Le qin est une cithare, à cordes pincées, dont nous trouvons déjà trace il y a 2000 ans. Cet objet a longtemps été courtisé par l'élite intellectuelle chinoise. Grâce à cet album, nous faisons face à l'enregistrement de précieuses pièces d'un recueil de musique chinoise très fameux, le Mei' An Qin Pu de 1931. De surcroît l'interprète Chen Leiji est, nous dit-on, prodigieux. Il est accompagné de François Picard, au xiao, une flûte chinoise.

Les cordes et la flûte se meuvent dans un tourbillon de ritournelles. Nous imaginons aisément une danse tout en lenteur en soutien des musiciens. La douceur de l'album est sans méandres, très lisse, un peu gai-luronne. Apport unanimement salué par les connaisseurs de musique du monde, il faut bien se prosterner devant un tel témoignage culturel. Pourtant, nous avons parfois des difficultés à éprouver plus qu'une forme de sympathie respectueuse, de circonstance, pour une musique glissant si gentiment le long de nos écoutilles. En effet il peut être ardu de se laisser happer. L'album traîne même franchement en longueur pour les moins passionnés du style proposé.

Témoignage musical, culturel et régional décisif, il est sans doute inapproprié de vouloir rendre ce "Recueil de l'Ermitage du Prunus" abordable au plus grand nombre, vain de vouloir lui ouvrir si vite les voies de nos cœurs et intellects occidentaux. Devons-nous alors dissimuler que, malgré notre bonne volonté, notre étonnement peine à se renouveler de morceaux en morceaux ? Sans vouloir réduire les interprétations de Chen Leiji à leur terroir, notons tout de même que l'universalité émotionnelle des créations présentées n'est pas directement accessible. Pour certains, les tableaux paysagers de Chen Leiji s'apparenteront à des ascensions flamboyantes ; pour beaucoup d'autres, à de joyeux gouffres insondables.