Avon Calling

Compilation

par Chtif le 14/05/2006

Note: 8.0    
Morceaux qui Tuent
Christine Keeler (Glaxo Babies)


Que ceux qui ont épuisé leur best of Subway Organisation se rassurent : le label Cherry Red remet le couvert en rééditant la compilation Avon Calling. Cette fois, on remonte un peu plus les aiguilles pour se retrouver à Bristol, fin 70. La scène est prolifique, et toutes les formations locales convergent sur Heartbeat Records pour y graver leurs premiers exploits. "Avon Calling" réunit plus de 40 morceaux du label indé, dénichés par un Simon Edwards au goût très sûr.

L'idéal pour se remémorer combien l'époque est charnière. La comète punk primale s'est embrasée, et laisse place à cette euphorie power pop dont la triste Angleterre avait tellement besoin : les Private Dicks ou autres Apartment balisent la voie pour des millions de formations anglaises en renouant avec un esprit garage 60's joueur et apolitique (et ne parlons pas des Sneak Preview, encore perchés dans un vieux psyché des familles). A ceci près que derrière le moindre recoin se cache cette touche typiquement british, ce côté absurde et loufoque à la limite de la rupture, bizarrerie ethnique sans laquelle les Monty Pythons n'auraient jamais pu cohabiter avec la Reine Mère. Entre autres ovnis, on retiendra l‚horrifique chanson de série Z "Too much commotion" par Moskow, ou encore "My dead mother", chantonné presque gaiement par Double Vision sur une pulsation reggae approximative.

D'autres ont déjà franchi le pas, à l'instar des Talking Heads ou autres Gang of Four, pour se lancer dans de glaciales expérimentations (on parle alors de post-punk). Les synthés restent encore relativement discrets, mais la new wave attend son heure, en filigrane. En pointe, la basse, principale mutante venue du dub jamaïcain, vient se briser sur des rythmes complexes et vicieux. Dans ce registre, les Glaxo Babies sont à l'honneur avec pas moins de six chansons: le groupe passe sans vergogne du funk au rock le plus arty, évoque le glam cuivré de Roxy Music sur "Christine Keeler", et entretient un malaise constant et prémédité. Effrayant et passionnant à la fois. L‚album s‚achève sur "Mouth" que les Skodas semblent avoir emprunté à leurs grands frères d'outre-Atlantique, les Residents.

La compilation bénéficia de l'appui d'un admirateur de première classe, John Peel, dont on entend ici quelques interventions radios. Une touche finale du meilleur effet pour ce témoignage fidèle et brillant (et quasi-didactique, ce qui ne gâche rien, pour une fois).