The very best of el Records

Compilation

par Jérôme Florio le 06/01/2006

Note: 10.0    
Morceaux qui Tuent
Anthony Adverse - Ulysses and the siren
Momus - Nicky
Shock headed Peters - I Bloodbrother be
The Monochrome Set - Jet-set junta
The Cavaliers - It's a beautiful game


Commençons 2006 par une plongée rafraîchissante dans l'auberge espagnole el Records : un label fondé par Mike Alway dans l'Angleterre des années 80, sabordé il y a environ onze ans, et qui a par la suite influencé toute une cohorte de jeunes gens précieux et ambitieux (The Divine Comedy, Jarvis Cocker de Pulp, Belle & Sebastian...). Les maîtres mots ici étaient fraîcheur et récréation – écrire des chansons l'esprit libre et le geste léger.

el Records a été un eldorado pour de nobles professions comme facteur (Vic Godard), roitelets pop (l'expatrié Louis Philippe, Kings of Luxembourg), petites frappes bien sapées (épatants Shock Headed Peters, "I Bloodbrother Be"), filles fofolles (Bad Dream Fancy Dress) ou distinguées (Florentines) et autres Cavaliers... Une petite aristocratie atteinte de Don Quichottisme léger : le chevalier errant prenait de simples auberges pour de fastueux palais, hé bien ici on joue à être Brian Wilson ("Guess i'm dumb" de Louis Philippe) ou Scott Walker (Momus avec "Nicky", librement inspirée de "Jackie" de Jacques Brel) - avec de la muzak à la place d'arrangements symphoniques, en y croyant très fort, et si possible dans l'insouciance la plus totale (Would be goods, "The camera loves me" et son gimmick de synthé impossible et désarmant).

Quand vous entrez ici, prière de faire preuve de bon esprit, car ça part tous azimuths : les espagnolades très à-propos des Kings of Luxembourg sur "Valleri" (genre de B-52's parachutés dans un western-spaghetti de Sergio Leone), un "The ruling class" trémoussant et latino-cocktail d'Anthony Adverse (qui ressemble furieusement à "Siffler sur la colline" de Joe Dassin – "laï laï laï laï"...). Et aussi du Zappa de poche (The Underneath, "Zophia") et une tentative de chant grégorien new-age (Simon Fisher Turner, "Umber wastes"). Bien de son époque quand même, on retrouve par ci-par là certains sons des eighties passés au filtre el : du punk-funk, des guitares "jingle-jangle" typées Smiths, et même du prog-rock (prog-pop ?) avec Momus. On mesure l'écart avec les groupes tellement sérieux et interchangeables actuels...

L'air de rien, il y a de purs moments de grâce, comme ce "Ulysses and the siren" qui a un pied nu sur une plage brésilienne. Ou l'irrésistible mambo-pop "It's a beautiful game" de The Cavaliers, qui résume bien la situation de ce label qui n'aura jamais marqué de hit majeur : du beau jeu, du panache, et des occasions à la pelle.