Open your eyes

Earth, Wind & Fire

par Francois Branchon le 19/11/2001

Note: 8.0    

Aux affluents que compte le fleuve funk, du torrent puissant de James Brown et ses JBs à la rivière spatiale de George Clinton et son extraordinaire famille de musiciens, se joint dans les seventies un hybride plus calme et maîtrisé, qui retient du funk originel l'aspect aiguisé et l'élan, mais parvient à conquérir le grand public. L'hybridation la plus réussie fut celle de Earth, Wind & Fire, au style coulé, dont les albums des années soixante-dix ont confirmé la capacité de réaliser ce 'crossover' si cher au business. Bien entendu, ce sont les singles devenus 'hits' qui ont construit l'image grand public du groupe. Mais leurs albums, ici remastérisés, rappellent que Earth, Wind & Fire fut 'aussi' un groupe d'album, qui dispensait un bel éclectisme, honorant un large spectre de traditions noires. "Open our eyes" fut, en 1974, le premier album qui rencontra à la fois la critique et le succès public. "Mighty mighty" en ouverture est un excellent exemple de funk léché. Un rythme contagieux construit sur la guitare, ponctué par des cuivres à la Sly Stone sur les refrains, et bordé d'harmonies vocales multiples, une recette qui deviendra marque de fabrique. Le morceau suivant, le plus doux et introspectif "Devotion", illustre une ligne spirituelle qu'EW&F fera aussi prospérer, puisant dans un vivier d'influences mystiques, chrétiennes et africaines, particulièrement l'Egyptologie. "Drum song" est un fragile morceau de percussions (images de la forêt tropicale), pendant que "Tee nine chee bit" met en scène conversations de rues et guitares psychédéliques qui ne dépareraient pas un album de Parliament. "Spasmodic movements" est un court instrumental de saxo, aux franges du jazz cool sans être guimauve. Parmi les titres bonus offerts par la réédition, "Ain't no harm to moan" est aussi brut qu'on peut l'attendre d'une chanson d'esclave. Rien ne dépasse dans un album de Earth, Wind & Fire, de la production à l'emballage vestimentaire, tout y est très américain mais redoutablement bien fait.