L'oiseleur

Feu! Chatterton

par Jérôme Florio le 10/06/2018

Note: 7.5    

Attention ! Groupe à "univers" ! C'est-à-dire un ensemble de signes qui le rend immédiatement reconnaissable sur un marché musical en disette de figures de proue, ce qui n'est pas le moindre de ses atouts commercialement parlant. Avec son bagage littéraire et des bacchantes apparentes, Feu! Chatterton construit un rock rétrofuturiste à la française, qui rapproche Jules Verne du road trip spatial de Thomas Pesquet, Boris Vian et la pop seventies nappée de claviers. On y décèle les gènes de tout un ADN bien chargé, Aznavour par exemple, ou encore Christophe que rappellent les sonorités liquides, verticales, et la voix de Arthur Teboul sur "Je ne te vois plus".

Il faut reconnaître que Feu! Chatterton a les épaules assez larges pour porter avec une grande légèreté toutes ces influences parfois intimidantes ; cette approche que l'on peut trouver un tantinet précieuse témoigne aussi d'une culture très bien digérée, et bien recrachée. Ceci dit, on laisse Teboul roucouler en se désintéressant un peu du sens des paroles, les sonorités de la langue française semblant plus importantes : elles coulent très agréablement (on a rêvé ou il a réussi à caser le mot "benjoin" ?), mais n'accrochent pas non plus l'oreille. Cependant, les Feu! Chatterton ne sont pas les premiers à pousser cette association rock-prose poétique : on pense à Tanger (*), en moins vénéneux. Volontiers suranné, tirant parfois en longueur (langueur), "L'oiseleur" réussit néanmoins à envelopper son romantisme lettré et extatique d'une une bulle musicale sensuelle, qui renvoie les reflets colorés et kaléidoscopiques d'une boule à facettes.



FEU ! CHATTERTON L'oiseau (Clip 2018)




(*) groupe de Philippe Pigeard (chant). En faisant des recherches à l'occasion de cette chronique on a appris qu'Alexandre, le fils de Philippe, faisait partie des trois victimes françaises des attentats de Londres le 3 juin 2017. Triste nouvelle, triste anniversaire.