Untold story

Frank Woeste Trio

par Sophie Chambon le 07/06/2007

Note: 8.0    

On vous l'avait bien dit que l'on avait pas fini d'entendre parler de lui. Frank Woeste signe un deuxième album en leader d'un trio, avec ses deux complices Mathias Allamane (contrebasse) et Matthieu Chazarenc (batterie) qui l'avaient accompagné sur son premier album "Mind at play". Remarqué par les programmateurs de l'AFIJMA (Association des Festivals Innovants de Jazz et de Musiques Actuelles), le jeune pianiste allemand a entraîné son groupe lors d'une tournée Jazz Migrations et consolidé ainsi son emprise. L'ensemble gagna alors en équilibre et savoir-faire, et dans l'échange confirma une belle sonorité. Après un an et demi, avec assez de matière pour un nouvel enregistrement, Frank Woeste était décidé à poursuivre l'aventure, dans une certaine continuité, toujours sur le même label Challenge, produit par le contrebassiste Hein van de Geyn.

Alors, nous direz-vous, un trio de plus qui s'affirme ? Peut-être, mais on ne boude pas son plaisir, tout au long des dix compositions du pianiste, à l'exception d'une ballade "In the wee small hours of the morning", qui ne dépare pas dans le contexte de ces Untold stories. Un bien joli titre d'ailleurs (Enrico Pieranunzi avait lui aussi tenté de dire l'indicible avec son Untold story, il y a une dizaine d'années) et un objectif précis : à chaque composition, une "histoire" qui dévoile une autre recherche formelle. La paire rythmique, parfaitement soudée, épouse les désirs de son leader : la structure du morceau est indissociable de l'état d'âme qu'il évoque (délicatesse cristalline de "Naked moon", tonicité de "Rare Day", fascination atmosphérique de "Silent conversation" à la manière de certain "Power trio" scandinave). Ces variations n'altèrent en rien la cohérence de l'album, tant cette approche, souvent intime, est d'une fluidité nerveuse, tempérant ainsi une sensibilité qui n'est jamais trop appuyée.

Efficace au piano classique comme au piano électrique Fender, Frank Woeste entend mener de front sa recherche sur les deux instruments : la combinaison, simultanée voire superposée des deux instruments ("Mother adrenaline", "Naked moon") confère du charme et une sonorité particulière à ses compositions. S'il suspend provisoirement son histoire, le pianiste continuera son itinéraire : gageons qu'un troisième épisode viendra compléter ce premier triptyque woestien.