A pocketful of soul

Jason Ringenberg

par Francois Branchon le 26/08/2000

Note: 9.0    
Morceaux qui Tuent
The price of progress
Under your command


Convoquant Abraham Lincoln pour célébrer le culte de la poule ("la plus intelligente et la plus noble des créatures terrestres, car ne chantant qu'après avoir pondu" !), Jason Ringenberg en rajoute une couche dans le pittoresque fermier avec le nom de son label et des photos de gallinacées les yeux dans les yeux ! Mais, sans surtout s'arrêter à la photo de pochette, résumé de tous les stéréotypes country (l'homme est connu comme un sacré mariole), passer illico à la musique car quel beau disque ! Jason Ringenberg (guitare acoustique et harmonica) n'est pas un inconnu. En 1982 il fondait Jason & the Scorchers, un combo qui s'était assigné en compagnie de quelques autres (Rank & File) la mission de redorer le blason du country-rock, en lui insufflant une énergie nouvelle. Ainsi naquirent quelques réussites country-punk ("Absolutely sweet Mary" de Bob Dylan et "Lost highway" de Hank Williams complètement ébouriffées) et des compositions originales en compagnie notamment de Michael Stipe de R.E.M. ("Both sides of the line" en 1983). Mais Jason s'est vite trouvé dans l'impasse absurde qu'impose le formatage des media (trop rock pour le monde country, trop country pour celui du rock) et les Scorchers n'eurent plus qu'à vivoter, jusqu'à un dernier album en 1995. Jason Ringenberg reprend les choses à son compte entouré du duo George Bradfute (tous instruments de 4 à 6 cordes) et Fats Kaplin (violon, accordéon et pedal-steel guitare). Si en quelques rares fois (2 !), les travers du bluegrass reviennent à la vitesse du cheval au galop ("A pocketful of soul" et "Hay bailing time" avec leurs banjos et glissés de violon), ils sont vite oubliés tant l'album porte une marque : celle d'un musicien "fusionnel", bourré de coeur, totalement incapable de choisir entre rock et country. Une fusion aujourd'hui très pop, "americana" comme l'appelle les anglo-saxons, qui laisse assez loin l'énergie punk des débuts mais donne à redécouvrir une grande voix, si claire ("Trail of tears") et donne des joyaux : "Oh lonesome prairie", le lancinant "Under your command", "The price of progress" (magnifique, les Pogues en visite bucolique dans la prairie américaine), "The last of the neon cowboys" (une country-pop oubliée depuis Poco ou les New Riders Of The Purple Sage), le doucement enveloppant "Merry christmas my darling" qu'aurait pu chanter Fairport Convention, "Oh lonesome prairie", "I never knew you" (typique du duo actuel Wilco-Billy Bragg), "The last ride" et ses guitares pleines d'écho rappelant les appels du large d'un "Ghostrider in the sky"... Les dénigreurs des musiciens country (souvent avec raison) vont devoir ramper devant Jason Ringenberg (Sefronia tiendra au courant des horaires des processions) !