Hard as love

Joseph Leon

par Jérôme Florio le 29/04/2009

Note: 8.0    

"Hard", Joseph Leon ? Pas vraiment, si on se fie à l'écoute de ce mûr et classieux premier disque : Joseph est un tendre qui aime la rondeur et le bois des guitares. Mais gare aux échardes.

Leon a la trentaine carrément désabusée, sentimentalement parlant. Sa voix grave est pourtant une belle arme de séduction, dans le registre Leonard Cohen - en moins sûr de son jeu ("Forever cold" croone comme "I'm your man"). La musique est acoustique, caressée par les rayons d'un soleil "west coast" à l'américaine parfait pour réchauffer les coeurs ("Up in the air", guitares amples, orgue et harmonica) : car bien que très soigné, "Hard as love" est l'oeuvre d'un homme seul. Joseph Leon a monté sa propre structure, sur laquelle il est l'unique artiste au catalogue ; la plupart des musiciens qui interviennent sur le disque ont été recrutés sur audition. On remarque notamment la présence de Kate Stables (This Is The Kit, Morning Star) aux choeurs délicats (le single "One in, one out").

"Hard as love" attend ainsi de sortir depuis fin 2006. L'urgence n'est pas de mise : c'est un disque adulte, réfléchi, avec des intentions artistiques affirmées. Après tout, Leonard Cohen a bien commencé sa carrière musicale sur le tard, à 33 ans. Comme le Canadien, Joseph a eu une vie avant la musique : il a sagement "fait son droit", et évolué dans le milieu universitaire. Alors quelle est la raison qui l'a poussé à faire le grand saut, surtout dans le contexte actuel ? Sur sa page myspace, un indice qui nous parle : dans la liste des influences, on aurait pu s'attendre à voir cités Nick Drake, Jackson Browne, ou Townes Van Zandt (la mélodie country-folk de "San Francisco bay"). Au contraire, il n'y a qu'une photo (non légendée) du réalisateur John Cassavetes, comme une déclaration d'intention : c'est le genre de rencontre qui peut changer une vie, ou du moins l'orienter. Cassavetes a mis tout son amour de la vie, tendre et violent, dans son cinéma : Joseph Leon semble mettre tout le sien dans ses chansons, à défaut d'un autre destinataire (les arpèges et les flûtes de "Myriam")...

Joseph Leon a de la tenue, et porte son spleen comme un costume sobre et élégant : des valeurs un peu surannées, en discrète résistance avec le tout-venant de la production actuelle.




JOSEPH LEON One in, one out (Live Radio 2009) © Ribenaaddicted